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Renforcer la concurrence équitable entre les entreprises fédérales et les entreprises privées
Le 15 septembre 2023, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) de présenter un complément aux principes de gouvernement d’entreprise d’ici le troisième trimestre 2024. Il entend ainsi renforcer la concurrence équitable entre les entreprises publiques et les entreprises privées.
Les enjeux:
- Stratégie de propriétaire et principes de gouvernement d’entreprise comme instrument de contrôle
- Une concurrence équitable demandée par le Parlement
- Une monopolisation préoccupante du fret de proximité
- De nouvelles tendances de financement croisé évidentes
- Un combat à armes inégales
Stratégie de propriétaire et principes de gouvernement d’entreprise comme instrument de contrôle
Les entreprises fédérales sont créées grâce à l’autonomisation d’unités administratives de la Confédération qui exercent des activités monopolisées conformément à la Constitution fédérale. Par exemple, la société par actions des Chemins de fer fédéraux (CFF), régie par une loi spé-ciale, a été créée dans le cadre de la réforme des chemins de fer de 1999. En tant que proprié-taire à 100 %, la Confédération dirige ses nombreuses entreprises fédérales en définissant et en mettant en œuvre une stratégie de propriétaire et des principes de gouvernement d’entreprise. Elle élit en outre les conseils d’administration. En plus de son rôle de propriétaire, la Confédéra-tion joue d’autres rôles: en tant que régulateur, elle co-réglemente les conditions du marché et commande parfois même des prestations de service public, par exemple dans le domaine du tra-fic régional des voyageurs. Il en résulte inévitablement certains conflits d’intérêts. Il serait tout à fait opportun de vérifier si cet enchevêtrement de fonctions est toujours d’actualité et adapté au trafic par wagons complets isolés et quel organe de contrôle en surveille l’utilisation.
Une concurrence équitable demandée par le Parlement
Les critiques croissantes du secteur privé à l’égard du comportement des entreprises fédérales qui, sur la base d’un mandat constitutionnel souvent très général, étendent toujours plus leur ac-tivité principale initiale et vont même jusqu’à racheter des entreprises privées, ont trouvé un écho au Parlement. Les Conseils ont ainsi adopté la motion 20.3531 «Pour une concurrence plus équi-table avec les entreprises publiques» du conseiller aux États PLR Andrea Caroni et la motion 20.3532 de la même teneur du conseiller aux États du Centre Beat Rieder. Avec le rapport du DEFR, le Conseil fédéral veut maintenant répondre à la demande de ces deux motions. Il attend des propositions sur la manière dont les départements peuvent organiser de manière plus sys-tématique et garantir de manière plus complète une concurrence équitable entre les entreprises fédérales et les entreprises privées dans le cadre de la gestion des entreprises fédérales.
Une monopolisation préoccupante du fret de proximité
Le rapport d’activité 2022 de la RailCom rend compte, entre autres, de l’enquête menée auprès des entreprises ferroviaires de fret sur les services de fret de proximité selon l’art. 6a de l’ordonnance sur le transport de marchandises (OTM). Il s’agit en l’occurrence de prestations de CFF Cargo, qui couvre le fret de proximité en Suisse de manière pratiquement monopolistique. Pour justifier le refus des services de fret de proximité, le rapport d’activité de la RailCom men-tionne le manque de ressources. Les personnes interrogées supposent toutefois qu’elles sont désavantagées en ce qui concerne les offres et que différents tarifs sont en circulation.
Les entreprises privées s’inquiètent tout autant de la monopolisation de l’offre de réseau de CFF Cargo dans la Consultation sur le projet de loi «Modernisation du transport suisse de marchan-dises» (cf. article de blog «Consultation «Fret ferroviaire sur tout le territoire»: deux variantes, beaucoup de points d’interrogation»). Elles demandent une délimitation stricte entre l’offre de ré-seau et l’offre de train complet en matière d’indemnisation et le maintien d’un accès non discrimina-toire aux services du fret de proximité (voir l’article du blog de la VAP «Externaliser le dernier kilo-mètre et l’organiser de manière non discriminatoire»). Il s’agit d’empêcher, à l’aide de mesures organisationnelles ou d’une séparation juridique, que certains services fournis par l’État fassent l’objet d’un financement croisé. C’est par exemple le cas aujourd’hui pour le refinancement de la caisse de pensions des CFF (CP CFF) par les bénéfices de CFF Immobilier.
De nouvelles tendances de financement croisé évidentes
Lors de l’audition sur la révision du prix du sillon 2025, les chemins de fer de marchandises de Suisse ont fait alliance et ont donné une réponse négative au Conseil fédéral le 29 août 2023 Prise de position sur la révision partielle de l’ordonnance de l’OFT sur l’accès au réseau ferroviaire OARF (cf. article du blog «Révision du prix du sillon 2025-2028: l’augmentation des prix n’est pas fon-dée»). Seul CFF Cargo, qui est entièrement intégré au groupe CFF et ne peut pas agir à sa guise, est resté à l’écart. Comme l’Office fédéral des transports se réfère entre autres à la baisse des recettes des sillons lors de la révision du prix du sillon, tout laisse penser qu’il s’agit d’un financement croisé caché des CFF, que CFF Cargo n’a évidemment pas le droit de criti-quer.
Le projet de loi élaboré par le Conseil fédéral «Modification de la loi sur les Chemins de fer fédé-raux (LCFF) – financement durable des CFF» du 15 septembre 2023 correspond également à une atteinte flagrante à la libre concurrence. Selon ce document, les CFF devraient bénéficier d’un apport de capitaux de 1,25 milliard de francs. L’utilisation exacte de ces fonds n’est toujours pas claire et les conditions qui pourraient changer cet état de fait à l’avenir font défaut. La filiale CFF Cargo, qui a par ailleurs bénéficié d’un soutien financier important suite à la pandémie de Covid, profite également de cet apport de capitaux. Elle est sur le point de conclure une conven-tion de prestations pour indemniser son trafic de réseau, qu’elle ne peut apparemment pas gérer de manière autonome. Les acteurs du secteur privé, en revanche, n’ont pas reçu de fonds Covid et ne disposent pas non plus de ressources et de participations importantes non nécessaires à l’exploitation, qu’ils pourraient mettre en vente pour renforcer leur capacité d’investissement.
Un combat à armes inégales
La complaisance du Conseil fédéral avec le traitement inégal des entreprises publiques et des entreprises privées saute aux yeux – et est regrettable. Malheureusement, cela n’engendre pas une saine concurrence dans le transport ferroviaire de marchandises, qui renforcerait sa force d’innovation et sa performance. Ces deux éléments sont indispensables pour que les acteurs du marché puissent conserver leurs clients actuels et en gagner de nouveaux. Ceci serait à son tour nécessaire pour parvenir à un transfert du trafic durable et pour intégrer à l’avenir le rail dans des chaînes d’approvisionnement multimodales. Et pour créer également de nouveaux em-plois orientés vers l’avenir.
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Révision de la loi sur les chemins de fer: l’effet maximum risque de ne pas être atteint
Le 12 septembre 2023, le Conseil national a approuvé la révision de la loi sur les chemins de fer (LCdF), à l’instar du Conseil des États, qui l’avait déjà adoptée à l’unanimité lors de la session d’été 2023. Toutefois, la révision de la LCdF ne pourra pas être mise en œuvre dans son intégralité tant que le 4e paquet ferroviaire de l’UE n’aura pas été intégré dans l’accord sur les transports terrestres ou que la solution transitoire conclue avec l’UE n’aura pas été prolongée. Certains effets escomptés pourraient donc ne pas être au rendez-vous.
 Les enjeux:
- Ce qui a été fait
- La Suisse a repris trois paquets ferroviaires de l’UE
- La LCdF révisée crée des conditions équivalentes
- Il faudra également adapter les ordonnances
- Il est nécessaire d’intégrer le 4epaquet ferroviaire de l’UE dans l’accord sur les transports terrestres
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Ce qui a été fait
Le 4e paquet ferroviaire de l’UE est en vigueur depuis le 16 juin 2019, et l’Agence ferroviaire européenne (ERA) est désormais chargée de délivrer des certificats de sécurité et homologations uniformes pour le matériel roulant destiné au trafic transfrontalier. Lors de la session d’été 2023, le Conseil des États a adopté la proposition de sa commission consistant à approuver la modification de la LCdF (mise en œuvre du volet technique du 4e paquet ferroviaire de l’UE).
Le 4e paquet ferroviaire de l’UE comprend trois éléments essentiels:
- Les directives applicables doivent être systématiquement harmonisées dans tous les États participants. Cela se fait par le biais de procédures institutionnelles de mise en vigueur des Spécifications techniques d’interopérabilité (STI) et de leurs mises à jour. Ainsi, les STI publiées par la Commission européenne sont désormais directement applicables dans tous les États; il n’y a plus besoin de processus de mise en œuvre nationaux.
- L’ERA s’assure que les autorités nationales de surveillance compétentes suppriment l’intégralité des prescriptions nationales obsolètes.
- L’ERA coordonne désormais les procédures d’homologation et émet des autorisations d’exploitation uniformes et valables dans tous les pays.
L’ERA possède le portail d’homologation en ligne de véhicules «One-Stop Shop». Pour les vérifications des dossiers d’homologation, elle travaille en étroite collaboration avec les autorités nationales de surveillance. Aujourd’hui, il est possible de faire une demande d’autorisation et de déposer le dossier correspondant dans le «One-Stop Shop» de l’ERA. L’ERA examine le dossier avec l’aide des autorités nationales de surveillance concernées et délivre une autorisation d’exploitation directement valable dans tous les pays demandés.
La Suisse a repris trois paquets ferroviaires de l’UE
La Suisse a repris les dispositions techniques pertinentes des trois paquets ferroviaires de l’UE dans le cadre de l’accord sur les transports terrestres conclu avec l’UE. Elle siège déjà en qualité d’observatrice dans les instances correspondantes œuvrant au développement de l’interopérabilité et coopère avec l’ERA. Une adhésion à l’ERA n’était jusqu’ici pas possible.
La LCdF révisée crée des conditions équivalentes
Le volet technique du 4e paquet ferroviaire de l’UE prévoit le remaniement des prescriptions relatives à l’interopérabilité (directive (UE) 2016/797) et à la sécurité ferroviaire (directive (UE) 2016/798)., de même que la transformation de l’ERA en autorité de l’UE chargée de la surveillance avec le guichet unique (One-Stop Shop) pour la procédure simplifiée (cf. article du blog «La Suisse risque d’être isolée dans le trafic ferroviaire international»). La révision de la loi sur les chemins de fer pose les fondations qui permettront la mise en œuvre du volet technique du 4e paquet ferroviaire. Elle prévoit de soumettre l’ensemble des entreprises ferroviaires suisses travaillant sur le mode de l’interopérabilité à des conditions équivalentes à celles imposées aux États membres de l’UE et d’ouvrir l’accès à la procédure d’homologation simplifiée passant par l’ERA.
Il faudra également adapter les ordonnances
Sur la base des modifications de la LCdF, l’OFT pourra dans un second temps réaliser au niveau des ordonnances la conformité nécessaire par rapport aux directives de l’UE. L’OFT a donc déjà préparé les projets de modifications des ordonnances correspondants et les a fait vérifier par la Commission européenne – avec un résultat positif. La Suisse a ainsi créé de manière autonome la base qui permettra à sa législation d’être équivalente de celle de l’UE.
Il est nécessaire d’intégrer le 4e paquet ferroviaire de l’UE dans l’accord sur les transports terrestres
Avec la mise en œuvre de la révision de la LCdF, la Suisse a gagné un temps précieux. En effet, plusieurs années s’écoulent généralement avant qu’une révision de loi puisse être mise en vigueur. Dans ce cas, les conditions-cadres légales nationales sont déjà données. Pour déployer pleinement son effet, il est toutefois nécessaire que le volet technique du 4e paquet ferroviaire de l’UE soit repris dans l’accord sur les transports terrestres et qu’une adhésion à l’ERA soit possible. Vu le contexte actuel, où les négociations entre l’UE et la Suisse en sont au point mort, il est toutefois peu probable qu’aucune de ces deux conditions se réalise dans un avenir proche. L’UE conditionne cela à une entente sur l’accord-cadre et sur l’ouverture du trafic de voyageurs en Suisse (partie du 3e paquet ferroviaire de l’UE). Jusqu’ici, cette revendication est restée lettre morte; l’ensemble des tentatives de l’OFT d’obtenir un geste de conciliation par un assouplissement du verrouillage de son marché de la part de la Suisse ont jusqu’ici échoué.
La pleine interopérabilité et une simplification fondamentale des procédures d’homologation réduisent les frais administratifs et d’exploitation. Ceci est fondamental pour un trafic ferroviaire (de marchandises) sûr et concurrentiel et donc pour la réussite du transfert du trafic.
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Tunnel de base du Saint-Gothard (#6): l’OFT soutient le trafic marchandises de manière pragmatique
À la suite de l’accident du train de marchandises survenu dans le tunnel de base du Saint-Gothard, l’Office fédéral des transports (OFT) encourage le fret ferroviaire par des mesures efficaces: le tunnel ne peut être utilisé que par les trains de marchandises. Les indemnités par train circulant en trafic combiné non accompagné (TCNA) seront prochainement relevées jusqu’à 1100 CHF. Notre association des chargeurs l’en remercie vivement. À propos: nous parlons aussi au nom de chargeurs étrangers.
Les enjeux:
- Le tunnel de base du Saint-Gothard n’est ouvert qu’aux trains de marchandises
- Des indemnités plus élevées pour le TCNA transalpin
- La VAP dit merci
Le tunnel de base du Saint-Gothard n’est ouvert qu’aux trains de marchandises
Depuis la remise en service du tube est du tunnel de base du Saint-Gothard, celui-ci est exclusivement ouvert au trafic de trains de marchandises. Une bonne centaine de sillons par jour sont possibles. 30 trains supplémentaires circulent chaque jour par la ligne de faîte. Le fret ferroviaire transalpin dispose ainsi chaque jour de 130 sillons au total. À titre de comparaison: en moyenne, 120 trains traversaient le tunnel de base chaque jour en 2022.
Grâce à cette mesure, les trains de marchandises peuvent assurer le fret ferroviaire pratiquement sans restriction. Certes, la déviation par la ligne de faîte implique un surcroît considérable. Mais elle concerne essentiellement le trafic intérieur, qui n’est pas tributaire d’un corridor de 4 mètres
Des indemnités plus élevées pour le TCNA transalpin
L’OFT se mobilise en faveur du transport ferroviaire de marchandises à travers les Alpes et notamment en faveur du trafic de transit (cf. «L'OFT renforce le trafic ferroviaire de marchandises à travers les Alpes»). Dans les semaines à venir, les indemnités par train circulant en trafic combiné TCNA seront augmentées de 200 CHF, pour atteindre jusqu’à 1100 CHF. Pour 2024, l’OFT ne veut pas non plus réduire les indemnités par envoi, mais n’appliquer qu’une réduction symbolique de 1 CHF pour les porter à 57 CHF par envoi. L’OFT soutient ainsi le TCNA transalpin de manière très pragmatique. Compte tenu des conditions rendues difficiles par les chantiers sur les lignes d’accès et de la situation conjoncturelle tendue, l’OFT renonce à poursuivre la voie actuelle de réduction des indemnités du TCNA.
La VAP dit merci
L’OFT mérite de vifs remerciements pour ce soutien pragmatique. Il renforce ainsi les efforts de toute la branche pour rendre les restrictions de capacité aussi supportables que possible, de manière ciblée et en unissant les forces, tant sur l’axe du Saint-Gothard que sur celui du Lötschberg. Nous y voyons le signe d’une politique commune de transfert du trafic de transit.

Révision des prix des sillons 2025–2028: une hausse des prix n’est pas justifiée
Les enjeux:
- Les prix de sillons ne sont pas calculés de manière transparente
- Les pertes de transport interdisent les augmentations de prix
- Respecter le principe de la couverture des coûts et le principe de causalité
- Inversement de l’incitation à faire circuler des trains de marchandises à faible usure
- Mettre davantage les exploitants d’infrastructure à contribution
Les prix de sillons ne sont pas calculés de manière transparente
Le rapport explicatif de l’Office fédéral des transports (OFT) de juin 2023 n’est ni conçu de ma-nière transparente, ni ne repose sur des justifications compréhensibles. Ainsi, les raisons de la définition actuelle du prix des sillons sont totalement opaques. Sachant que l’OFT renvoie entre autres à une baisse des recettes des sillons, on a l’impression qu’il s’agit d’un financement trans-versal caché des CFF. Dans le contexte du projet de loi «Financement durable des CFF» et de la réduction prévue de la contribution de couverture qu’il prévoit dans le transport de voyageurs des CFF, cette justification n’est pas acceptable pour les représentants du transport de mar-chandises. Nous avons donc donné une réponse négative au projet de loi mentionné, comme on peut le lire dans notre réponse à l’audition du 7 mars 2023 et à l’article de notre blog intitulé «Plutôt que d’empocher une enveloppe budgétaire de 3 milliards, les CFF doivent assumer leurs responsabilités».
Les pertes de transport interdisent les augmentations de prix
Une augmentation de prix est inacceptable compte tenu des pertes de trafic dans les transports intérieur, d’importation, d’exportation et de transit et des prix de sillon nettement plus avantageux dans le contexte européen. Les chargeurs sont notamment exposés depuis des années à des hausses de prix dramatiques dans le trafic par wagons complets. Ces hausses sont justifiées par des facteurs exogènes tels que les prix des sillons.
Respecter le principe de la couverture des coûts et le principe de causalité
L’OFT justifie l’augmentation de prix par le principe de la couverture des coûts. Or celle-ci serait respectée même en cas de baisse des prix dans le transport de marchandises. Au contraire, une réduction des prix correspond au principe de causalité, car le transport de marchandises contribue à payer les coûts marginaux standards d’un réseau moyennement aménagé principa-lement orienté sur les besoins du transport des personnes. Or les chargeurs ne remarquent rien des efforts consentis par les exploitants d’infrastructure pour réaliser et maintenir l’infrastructure à des coûts plus avantageux.
Une inversion de l’incitation à l’utilisation de wagons à faible usure
Ce que l’on appelle le facteur d’usure doit servir d’incitation pour utiliser du matériel roulant à faible usure. Entre-temps, c’est le contraire qui est vrai: le Conseil fédéral oblige la branche non seulement à payer des prix de sillon toujours plus élevés, mais aussi à investir des moyens fi-nanciers supplémentaires dans du matériel roulant à faible usure.
Mettre davantage les exploitants d’infrastructure à contribution
La révision des prix des sillons présentée protège les exploitants d’infrastructure. En tant que re-présentants des exploitants de voies de raccordement et de terminaux directement concernés par les coûts de planification, de construction et de maintenance de CFF Infrastructure dans des voies de raccordement centralisées, nous observons des inefficiences considérables et une manière presque éhontée d’utiliser les moyens financiers. Ceci est très probablement également vrai pour le réseau public. La confédération doit donc aussi obliger les exploitants d’infrastructure à limiter les coûts.

Tunnel de base du Saint-Gothard (#5): Trop tôt pour imputer la faute et la responsabilité
Selon le l’édition principale du journal télévisé de la SRF du 27 août 2023 l’Office fédéral des transports (OFT) estime que CFF Cargo est seule responsable des conséquences de l’accident ferroviaire de marchandises dans le tunnel de base du Gothard. Une omission dans la réforme des chemins de fer est pointée du doigt; auparavant, tous les wagons de marchandises devaient être immatriculés auprès des chemins de fer publics. Nous sommes pour notre part d’avis: Les spéculations sont prématurées, surtout dans des médias de portée natio-nale. Cette polémique ne fait pas avancer d’un pouce la solution du problème. Seul le rapport du Service d’enquête de sécurité suisse (SESE) clarifie les faits et permet de réagir de manière ciblée.
Les enjeux:
- L’État garde la main sur le marché ferroviaire
- La réforme des chemins de fer a effectivement réformé le droit de la responsabilité civile
- Les détenteurs de wagons sont responsables indépendamment de leur faute
- Le Conseil fédéral n’a pas proposé de modifier le droit
- Les dispositions contractuelles sont publiques
- Assumer ses responsabilités sur la base du rapport SESE
- Le régime de responsabilité actuel est économiquement équilibré
- Réfléchir aux effets pervers des modifications législatives
L’État garde la main sur le marché ferroviaire
La Confédération considère que la responsabilité de l’accident ferroviaire de marchandises dans le tunnel de base du Saint-Gothard incombe clairement à la filiale des CFF, CFF Cargo. Un porte-parole de l’OFT a fait savoir, lors du journal télévisé de la SRF du 27 août 2023, que le droit de la respon-sabilité civile en vigueur datait de l’époque des chemins de fer publics. Eh bien: Les temps n’ont pas changé. Les chemins de fer publics CFF dominent toujours le marché du fret ferroviaire. Il y a quelques semaines, le Conseil fédéral a approuvé la renationalisation de CFF Cargo. En réponse à l’interpellation du conseiller national PLR Christian Wasserfallen, il a précisé que les actionnaires pri-vés n’avaient pas amélioré la situation (financière) de CFF Cargo.
La réforme des chemins de fer a effectivement réformé le droit de la responsabilité civile
À l’occasion de la réforme des chemins de fer, la Convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF) a été révisée, tandis que l’infrastructure et l’exploitation ont été scindées. Dans le même temps, CFF Cargo a résilié les contrats d’immatriculation. Le privilège de monopole en vertu duquel les wagons de marchandises devaient être immatriculés auprès d’une société de chemins de fer publics et être entretenus par celle-ci a ainsi été aboli. En revanche, les conditions d’utilisation des wagons de marchandises entre les entreprises ferroviaires de fret et les détenteurs de wagons ont fait l’objet d’une uniformisation internationale sur la base de la COTIF – connue sous l’appellation «Contrat uniforme d’utilisation des wagons (CUU)». La COTIV et le CUU prévoient un régime de res-ponsabilité plus strict que ne le souhaiterait l’OFT, à en juger ses réserves sur les solutions de branche uniformisées au niveau international. Mauvaise surprise pour les détenteurs de wagons au moment où ils ont dû reprendre et assumer l’entière responsabilité pour l’entretien de leurs wagons: les CFF leur ont remis une documentation extrêmement indigente sur l’état et les activités de mainte-nance effectuées sur leurs wagons par CFF Cargo jusqu’à la résiliation des contrats d’immatriculation. Depuis lors, les détenteurs sont eux-mêmes responsables de leurs wagons de marchandises et ont mis de l’ordre dans les charges du passé reprises des CFF.
Les détenteurs de wagons sont responsables des défauts de leurs wagons
Par son commentaire au journal télévisé de la SRF, le porte-parole de l’OFT a laissé entendre que les entreprises privées de transport ferroviaire ou les détenteurs de wagons de marchandises n’avaient pas à répondre des dommages causés par les accidents. Ce n’est pas vrai. Les entreprises de transport ferroviaire et détenteurs de wagons européens et suisses engagent leur responsabilité depuis la création en 2006 du CUU, lequel a été renforcé en 2017. Aujourd’hui, les entreprises de transport de fret ferroviaire doivent en principe répondre des dommages en cas d’accident impliquant des trains de marchandises sur le réseau ferroviaire suisse, indépendamment de toute faute de leur part (responsabilité objective aggravée). Si le dommage a été causé par des défauts affectant un wagon de marchandises appartenant à un tiers, la faute du détenteur du wagon concerné est con-tractuellement présumée. L’opérateur de fret ferroviaire concerné peut exercer une action récursoire contre le détenteur du wagon. Celui-ci ne peut s’exonérer de sa responsabilité envers l’opérateur de fret ferroviaire que s’il peut prouver l’absence de faute (renversement de la charge de la preuve). Pour en savoir plus, consultez notre article de blog «Tunnel de base du Saint-Gothard (#3): Les dis-positions en vigueur en matière de responsabilité civile sont suffisantes».
Le Conseil fédéral n’a pas proposé de modifier le droit
Christoph Leisibach, rédacteur à la SRF, a indiqué qu’aux termes d’un rapport, le Conseil fédéral aurait proposé d’apporter des modifications au droit de la responsabilité, par exemple, de renforcer la responsabilité des détenteurs de wagons. Cette affirmation est fausse. Le Conseil fédéral a certes présenté des options dans son rapport de l’OFT du 21 juin 2023 en réponse au postulat 20.4259 intitulé «Vue d’ensemble de la responsabilité civile dans le transport de marchandises par rail», mais il a explicitement renoncé à une modification des dispositions.
Les dispositions contractuelles sont publiques
La SRF-Tagesschau a interrogé le professeur Frédéric Krauskopf en tant qu’expert. À la question de savoir si CFF Cargo pouvait recourir à une (co)responsabilité du détenteur du wagon de marchan-dises endommagé, M. Krauskopf a renvoyé au contrat entre les deux parties. Il s’agit du CUU, men-tionné précédemment. Ce contrat étant publié, il est donc également accessible aux professeurs et aux chaînes de télévision publiques. CFF Cargo a approuvé le CUU à l’unanimité avec toutes les autres entreprises ferroviaires nationales en Europe.
Assumer ses responsabilités sur la base du rapport SESE
À la VAP, nous nous penchons de manière intensive sur la question des responsabilités et de leur étendues suite à l’accident de train de marchandises survenu le 10 août 2023. Pour apporter des réponses précises en temps utile à ces questions, il faut attendre le dépôt du rapport du SESE.
Le régime de responsabilité actuel est économiquement équilibré
Les détenteurs de wagons doivent veiller à ce que leurs wagons soient homologués et entretenus conformément aux dispositions législatives et règlementaires et aux normes en vigueur. C’est en comptant sur le respect de ces obligations par le détenteur du wagon que les entreprises de trans-port de fret ferroviaire prennent en charge les wagons. Ils effectuent tous les contrôles nécessaires afin que le train puisse circuler en toute sécurité. Les détenteurs de wagons n’ont aucune influence sur la préparation et le départ des trains. Les entreprises de transport de fret ferroviaire décident de manière autonome de la nature et des modalités de ces contrôles, puisqu’ils sont également les seuls responsables de la sécurité de l’exploitation d’un train. Il est par conséquent raisonnable, d’un point de vue économique, que les entreprises de transport de fret ferroviaire assument à titre princi-pal la responsabilité des contrôles effectués avant le départ des trains et des conséquences éven-tuelles. Si un défaut du wagon s’avère après coup être la cause du dommage (par exemple un bris de roue), le détenteur du wagon engage sa responsabilité à l’égard de l’entreprise de transport de fret ferroviaire au titre des dommages occasionnés, à moins qu’il ne puisse prouver qu’il n’est pas responsable du défaut (renversement de la charge de la preuve). C’est exactement le même régime de responsabilité que celui existant aujourd’hui en matière de transport routier entre le détenteur du véhicule tracteur et le détenteur de la semi-remorque ou de la remorque.
Réfléchir aux effets pervers des modifications législatives
Un renforcement des dispositions, déjà fort détaillées, en matière de responsabilité, n’accroîtra pas la sécurité du transport ferroviaire de marchandises et ne fera pas circuler le moindre train de marchan-dises supplémentaire. Au contraire. Tout changement apporté aux règles en matière de responsabili-té a des répercussions sur l’économie de marché, ce qui peut par exemple se traduire par des majo-rations de prix de location des wagons de marchandises et, surtout, des complications et charges accrues pour les transferts de wagons d’un domaine de responsabilité à l’autre. L’accès à un pool de 550 000 wagons de marchandises issus de toute l’Europe et garanti par le CUU, pourrait être brus-quement restreint en Suisse suite à une modification unilatérale inconsidérée de la loi, ce qui porte-rait préjudice à l’environnement et nuirait à la place économique suisse.

Tunnel de base du Saint-Gothard (#4): composants critiques pour la sécurité des wa-gons de marchandises
Les informations officielles publiées sur le déraillement du train de marchandises dans le tunnel de base du Saint-Gothard font état du bris d’un disque de roue sur un wagon de marchandises qui a déraillé. Une sollicitation excessive ou un défaut de matériau sont des causes possibles de la défaillance. Ce qui s’est réellement passé résultera de l’enquête en cours du Service d’enquête suisse sur les accidents (SESE).
Les enjeux:
- Comment sont fabriqués les composants critiques pour la sécurité?
- Comment sont-ils autorisés et mis en service?
- Comment sont-ils entretenus?
- Quelle est l’importance de la surveillance au quotidien?
- Quelles sont les possibilités de surveillance disponibles?
- Des règles uniformes permettent une interaction sûre entre les acteurs
- La perspective du couplage automatique digital (DAC)
Comment sont fabriqués les composants critiques pour la sécurité?
Les composants pertinents pour la sécurité et les composants critiques pour la sécurité, tels que les essieux, sont conçus de manière à remplir leur fonction pendant la durée d’utilisation prévue dans les conditions de service et d’utilisation prédominantes, garantissant ainsi une circulation sûre. À cette fin, les entreprises productrices appliquent des normes reconnues au niveau international:
- Les spécifications techniques d’interopérabilité (STI) définissent les exigences essentielles.
- Les normes européennes (EN) définissent les propriétés spécifiques.
- Pour le développement et les essais, les fabricants utilisent des méthodes de sécurité harmonisées et normalisées.
- Des rapports de sécurité et des expertises normalisés documentent la sécurité et l’aptitude.
Le développement des normes et des STI est constamment enrichi par l’expérience internatio-nale acquise lors d’incidents et d’accidents.
Comment sont-ils autorisés et mis en service?
La mise sur le marché de composants critiques pour la sécurité requiert l’autorisation interna-tionalement uniforme de l’Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer (ERA) ou d’une autorité nationale de sécurité. Les autorisations sont les suivantes:
- Homologations de série pour les composants ou les véhicules
- Attestations de conformité pour les composants de série ou de véhicules identiques
- Marquage CE (Conformité Européenne) pour un composant conforme aux directives européennes en vigueur
- Autorisation d’exploiter pour un véhicule conforme aux règles
L’attestation certifiant que les composants ont été construits conformément aux exigences des normes et des STI est délivrée par des «services mentionnés», c’est-à -dire des organismes autorisés par l’État. Ceux-ci contrôlent et évaluent la conformité des produits fabriqués aux règles prescrites.
Comment sont-ils entretenus?
Le fabricant est tenu de définir et de publier les consignes de maintenance à appliquer pour tous les composants ou véhicules. Les détenteurs de wagons sont tenus d’appliquer ces con-signes du fabricant en fonction des conditions d’utilisation. Ils désignent des entités de mainte-nance certifiées (Entity in Charge of Maintenance, ECM) pour leur matériel roulant. Ces entités élaborent les consignes de maintenance des véhicules qui leur sont attribués, en tenant compte de leurs propres connaissances et de celles du secteur. Elles planifient en outre des travaux périodiques, les exécutent et documentent leurs résultats. Tout véhicule ayant fait l’objet d’une autorisation d’exploiter doit être inscrit dans un registre officiel des véhicules, avec mention du détenteur du véhicule et de l’ECM.
Quelle est l’importance de la surveillance au quotidien?
Les entreprises de transport ferroviaire (ETF) sont responsables de la sécurité de la circula-tion, de la préparation des trains, du traitement des trains et d’autres aspects de la sécurité de leurs trains. Elles définissent les contrôles et les tests qui garantissent que chaque départ puisse se dérouler en toute sécurité. Pour constater cette aptitude au fonctionnement, du per-sonnel qualifié effectue sur site des contrôles visuels définis avant le départ. Ce travail, qui se déroule à n’importe quelle heure et par tous les temps, est extrêmement exigeant. Une attention particulière est également accordée aux composants critiques pour la sécurité dans le cadre du traitement des trains et des contrôles et tests qui y sont liés.
Quelles sont les possibilités de surveillance disponibles?
Les détenteurs de wagons sont responsables du bon entretien de leurs véhicules. Les compo-sants pertinents pour la sécurité et les composants critiques pour la sécurité sont contrôlés périodiquement, par exemple au moyen de mesures par ultrasons. Les composants critiques pour la sécurité sont non seulement soumis à des contrôles stricts, mais également à des obli-gations particulières en matière de marquage, de maintenance et de traçabilité des mesures. Les ETF peuvent demander au détenteur du wagon des informations spécifiques au véhicule.
Sur le réseau suisse à voie normale, les exploitants d’infrastructure exploitent aujourd’hui plus de 250 dispositifs de contrôle des trains. Ils surveillent chaque véhicule qui passe pour détecter des irrégularités et peuvent déclencher une alarme en cas d’écart non autorisé. Dans ce cas, le train concerné est immédiatement arrêté et contrôlé.
Des règles uniformes permettent une interaction sûre entre les acteurs
Dans l’exploitation ferroviaire, différentes entreprises agissent de concert. Chaque acteur doit ainsi pouvoir compter sur la fiabilité de l’autre dans leur interface. Leurs domaines d’activité et leurs responsabilités sont clairement définis et uniformisés à l’échelle internationale. Des règles harmonisées en matière de fabrication, d’exploitation et d’entretien garantissent la sécurité du transport ferroviaire (vous en apprendrez davantage sur le régulateur de la coopération inter-nationale prochainement sur ce blog).
La perspective du couplage automatique digital (DAC)
Outre la mise en œuvre des directives en vigueur par chaque acteur impliqué dans le transport ferroviaire, les nouvelles technologies occupent désormais une place centrale. L’automatisation et la digitalisation ne permettent pas seulement de concevoir des processus d’exploitation plus efficaces, mais elles offrent également de nouvelles possibilités en matière de surveillance opé-rationnelle des composants pertinents pour la sécurité et des composants critiques pour la sécurité des trains de marchandises. Le relevé numérique permanent de l’état de ces compo-sants fournit aux responsables un atout intéressant. Le suivi numérique des processus d’usure et de vieillissement de chaque véhicule permet de planifier l’entretien de manière efficiente en fonction des besoins. Les composants défectueux peuvent être identifiés et remplacés en amont d’une défaillance totale. La survenance inattendue d’une défaillance d’un composant en cours de trajet peut déclencher immédiatement une alarme.
Pour mettre à profit cette innovation dans le transport de marchandises, les wagons de mar-chandises doivent être équipés de capteurs, alimentés en énergie électrique et ils doivent être capables de communiquer des données avec le conducteur de locomotive, les systèmes des détenteurs de wagons et l’ECM. Ces conditions sont créées par l’introduction, prévue dans toute l’Europe, du DAC (cf. blogpost «Écosystèmes de données: partager les données pour doubler leur plus-value»). L’automatisation et la digitalisation transforment ainsi le transport tra-ditionnel en un transport intelligent, efficace, résilient et sûr.
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Tunnel de base du Saint-Gothard (#3): les dispositions en vigueur en matière de responsabilité civile sont suffisantes
L’accident de train de marchandises survenu dans le tunnel de base du Saint-Gothard a soulevĂ© des questions de responsabilitĂ© que le Conseil fĂ©dĂ©ral avait de toute façon mises Ă l’ordre du jour. Lors de sa sĂ©ance du 21 juin 2023, il a adoptĂ© un rapport sur les options d’action visant Ă renfor-cer les dispositions relatives Ă la responsabilitĂ© civile dans le transport ferroviaire de marchan-dises. Dans cet article de blog, vous dĂ©couvrirez Ă quoi elles ressemblent et ce que nous en pen-sons.Â
Les enjeux:
- Les entreprises de transport ferroviaire (ETF) sont responsables indépendamment de leur faute
- Le Conseil fédéral propose quatre options d’action présentant chacune des avantages et des inconvénients
- Nous sommes pour notre part d’avis que les responsabilités et les contrôles sont suffi-samment réglementés
- Les acteurs assument leurs responsabilités, même en l’absence de nouvelles dispositions
Les entreprises de transport ferroviaire (ETF) sont responsables indépendamment de leur faute
Actuellement, les ETF doivent en principe assumer les dommages en cas d’accidents impliquant des trains de marchandises sur le réseau ferroviaire suisse, indépendamment de toute faute de leur part. On parle de «responsabilité objective». Il n’en est pas ainsi lorsque le dommage a été causé par des défauts sur un wagon de marchandises appartenant à un tiers. Dans ce cas, la faute du détenteur du wagon concerné est contractuellement présumée. Le détenteur ne peut s’exonérer de cette responsabilité que s’il peut prouver l’absence de faute. En jargon juridique, cela s’appelle «renversement de la charge de la preuve».
Le Conseil fédéral propose quatre options d’action présentant chacune des avantages et des inconvénients
Le Conseil fédéral donne suite au postulat 20.4259 dans son rapport du 21 juin 2023 intitulé «Vue d'ensemble relative à la responsabilité civile dans le transport ferroviaire de marchandises». C’est l’aboutissement de la motion 20.3084
«Clarifier les règles relatives à la responsabilité civile dans le transport ferroviaire de marchan-dise» de Frédéric Borloz (voir article du blog de la VAP «Motion Borloz»). Dans le cadre de sa vue d’ensemble, le Conseil fédéral présente au Parlement quatre options d’action:
- Étendre la responsabilité pour risque des ETF aux cas où le sinistre n’est pas causé par le risque caractéristique de l’exploitation ferroviaire. Cette mesure s’accompagnerait d’une augmentation de la somme minimale assurée par les ETF.
- Obliger les ETF à souscrire une assurance responsabilité civile suffisante, couvrant éga-lement les dommages causés par les transports de marchandises dangereuses. Dans cette hypothèse, ni la responsabilité pour risque des ETF ni celle des détenteurs de véhi-cules ne seraient étendues.
- Introduire une responsabilité objective des détenteurs de wagons pour les dommages dont il est prouvé qu’ils ont été causés directement ou indirectement par leurs véhicules ou leur chargement, par exemple en cas de fuite de marchandises dangereuses d’un wagon en stationnement. Les détenteurs de wagons seraient ainsi tenus de souscrire une assu-rance responsabilité civile suffisante à cet effet.
- Maintenir les dispositions existantes.
Le Conseil fédéral souligne que chaque option présente des avantages et des inconvénients. De son point de vue, il n’y a aucune nécessité impérieuse de légiférer à ce sujet. Il se montre cepen-dant disposé à approfondir certaines variantes à la demande du Parlement.
Nous sommes pour notre part d’avis que les responsabilités et les contrôles sont suffi-samment réglementés
En tant qu’association des chargeurs, nous sommes d’avis que les responsabilités et les con-trôles sont déjà clairement régis par le droit international et les contrats internationaux. Les dispo-sitions internationales de transport, connues sous l’appellation de «Contrat uniforme d’utilisation des wagons (CUU)», entre plus de 750 entreprises ferroviaires et les détenteurs de wagons rem-plissent déjà , dans leur version actualisée de 2017, les conditions de renforcement de la respon-sabilité à la charge des détenteurs de wagons, résultant de l’option 3 présentée par le Conseil fé-déral. Le CUU prévoit que les détenteurs de wagons sont responsables des défauts de leurs wa-gons, sauf s’ils peuvent prouver l’absence de faute.
Les acteurs assument leurs responsabilités, même en l’absence de nouvelles dispositions
Sous le régime de responsabilité actuellement en vigueur, les détenteurs de wagons qui sont membres de notre association disposent de larges couvertures d’assurance, car ils sont respon-sables de l’entretien de leurs wagons. L’introduction d’une obligation légale supplémentaire d’assurance ou l’instauration d’une responsabilité pour risque pour les wagons de marchandises circulant en Suisse entraverait massivement la libre utilisation des wagons de marchandises étrangers (qu’ils soient privés ou appartenant à des ETF). Une telle mesure entraînerait une perte considérable de flexibilité dans le transport international de marchandises, tant dans l’import/export que, notamment, dans le trafic en transit. Nous continuerons à suivre de près cette question et à rendre compte des derniers développements.

Tunnel de base du Saint-Gothard (#2): Dispositifs automatiques de contrĂ´le des trains
Le 10 août 2023, un train de marchandises a déraillé dans le tunnel de base du Saint-Gothard. Quelques minutes avant son entrée par le portail sud, il a été contrôlé par des dispositifs automa-tiques de contrôle des trains (DCT). Selon les données de contrôle, le train est entré dans le tun-nel sans problème.
Les enjeux:
- Que sont les DCT fixes?
- Que peuvent faire les DCT?
- Comment les DCT sont-ils perfectionnés?
- Le couplage automatique digital (DAC) et l’avenir
Que sont les DCT fixes?
Les dispositifs de contrôle des trains (DCT) fixes font partie de l’infrastructure ferroviaire et sont mis en œuvre à des endroits stratégiques sur le réseau. Grâce à des capteurs et d’autres technologies, ils contrôlent le train circulant, c’est-à -dire chacun des véhicules. Les données ainsi recueillies sont traitées et utilisées dans le cadre de l’exploitation ferroviaire quotidienne pour assurer la sécurité, améliorer la ponctualité et réduire l’entretien.
Que peuvent faire les DCT?
Leur domaine d’application initial visait à protéger l’infrastructure afin de réduire les perturbations et les dommages et accroître la sécurité du service ferroviaire.
- Détecter les boîtes chaudes
- Détecter les surfaces de roulement des roues
- ContrĂ´ler les pantographes
- Prévenir les incendies et les incidents chimiques
- Mesurer la charge par essieu
- Protéger le gabarit d’espace libre
- Constater les phénomènes naturels
- Autres
Sur l’axe nord-sud et sur l’axe est-ouest, plus de 10 000 trains font quotidiennement l’objet d’un contrôle dynamique par plus de 250 DCT. En moyenne, une bonne vingtaine d’alarmes sont déclenchées chaque jour.
Comment les DCT sont-ils perfectionnés?
CFF Infrastructure perfectionne la structure de contrôle actuelle dans le cadre du projet d’innovation «Wayside Intelligence» (WIN), soutenu par des fonds publics de l’Office fédéral des transports (OFT). En complément des données des capteurs, des données d’image seront désormais saisies et les différents véhicules seront identifiés au moyen du système «Radio-Frequency Identification» (RFID). Les données sont analysées de manière algorithmique, agrégées et mises à la disposition des utilisateurs pour un usage ciblé par le biais d’interfaces normalisées d’échange de données. Cette évolution vise à améliorer la maintenance en se référant à l’état actuel du véhicule. Elle permet en même temps de simplifier les processus de maintenance grâce à l’intelligence artificielle et à l’automatisation. Ce projet est déjà bien avancé et devrait permettre d’améliorer la sécurité et la disponibilité du réseau et des véhicules.
Le DAC et l’avenir
Avec l’introduction du DAC, les véhicules alignés dans les trains seront connectés entre eux par une ligne de transmission de données. L’exploitant d’infrastructure sait à tout moment quel véhicule circule sur le réseau, dans quel train, et ce à la minute près. Grâce à cette intégrité des trains, les données provenant des DCT seront disponibles de manière plus rapide et plus fiable. Pour en savoir plus sur le DAC et les écosystèmes de données, lisez notre blogpost «Écosystèmes de données: partager les données pour doubler leur plus-value». Lors d’une interview accordée à l’émission «10 vor 10», Jürgen Maier, expert en transport de marchandises de la VAP, explique dans quelle mesure le DAC peut contribuer à éviter des accidents ferroviaires comme celui qui s’est produit dans le tunnel de base du Saint-Gothard.

Tunnel de base du Saint-Gothard (#1): engagés en faveur d’un traitement global
Le 10 août 2023, un train de marchandises a déraillé dans le tunnel de base du Saint-Gothard. Le Service suisse d’enquête de sécurité (SESE) privilégie l’hypothèse d’un bris de disque de roue. À la VAP, nous allons traiter l’événement de manière systématique et orientée vers les risques.
Les enjeux:
- Le plan d’urgence fonctionne, approvisionnement assuré
- Triangle des responsabilités éprouvé
- Normes de sécurité respectées
- Relations juridiques globalement réglées
- Les bris sont rares, mais ne sont pas exclus
- Poursuivre l’objectif de transfert
Les concepts d’urgence fonctionnent
Grâce à des concepts d’urgence plus élaborés, les acteurs clés ont réagi rapidement et de ma-nière appropriée après l’accident: l’approvisionnement en marchandises est assuré, les wagons de marchandises et de voyageurs circulent à nouveau. Les concepts d’urgence des entreprises de fret ferroviaire incluant des trafics de déviation par le corridor de transit ont fait leurs preuves. Les leçons de Rastatt ont été tirées et le secteur est prêt à faire face à une situation d’urgence.
Triangle de responsabilité éprouvé
Le système de fret ferroviaire repose sur l’interaction, sur un pied d’égalité, entre le gestionnaire de l’infrastructure (dans le tunnel de base du Saint-Gothard: les CFF) et les entreprises de trans-port ferroviaire (chemins de fer de marchandises), ainsi que d’autres acteurs, tels que les déten-teurs de wagons, qui ont une influence potentielle sur l’exploitation sûre du système ferroviaire. Tous les intervenants disposent de systèmes de sécurité perfectionnés et appliquent les mêmes règles européennes quant aux interfaces entre les acteurs.
Normes de sécurité respectées
En l’état actuel des informations, tous les acteurs ont respecté les méthodes et normes tech-niques de sécurité. Les trains qui entrent dans le tunnel de base du Saint-Gothard par le portail sud sont contrôlés en dernier lieu à Claro (TI) par des installations de contrôle automatiques des trains. Selon les données disponibles, le train qui a déraillé ne présentait pas d’anomalie lors de son entrée dans le tunnel. Les détenteurs de wagons et leur «Entity in Charge of Maintenance» (ECM, en français: «bureau responsable de la maintenance») sont responsables de la mainte-nance et de la sécurité de l’état opérationnel des wagons lors de leur remise à l’entreprise ferro-viaire de fret. L’ECM, qui est certifiée par des organismes indépendants, définit ainsi des mesures de maintenance et veille à leur mise en œuvre et à leur documentation conformément aux mé-thodes et normes techniques de sécurité.
Relations juridiques globalement réglées
Les détenteurs de wagons mettent leurs wagons à la disposition des entreprises ferroviaires de fret en vue de leur utilisation par ces dernières. Les entreprises de fret ferroviaire utilisent pour leur part les réseaux des gestionnaires d’infrastructure. Toutes les conditions d’utilisation sont contractuellement réglées de manière uniforme en Suisse et au niveau international. En ce qui concerne les relations entre les entreprises ferroviaires de fret et les détenteurs de wagons, l’article 20 de la loi suisse sur le transport de marchandises (LTM) renvoie à la Convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF). Sur la base de cet accord international, plus de 770 entreprises de fret ferroviaire et détenteurs de wagons en Europe ont instauré depuis 2006 un contrat multilatéral supplémentaire, le «Contrat uniforme d’utilisation des wagons» (CUU), qui règle en détail les relations juridiques entre les détenteurs de wagons et les entreprises ferro-viaires.
Les bris sont rares, mais pas exclus
On ignore encore comment le déraillement s’est produit et le SESE poursuit ses investigations. Dans le cadre de la gestion du sinistre qui suivra, il y aura lieu d’élucider les causes, clarifier les questions relatives à la responsabilité et à l’indemnisation et analyser les dispositifs de sécurité actuels. Les bris de disques de roue sont très rares. En pareil cas, une influence extérieure et une usure matérielle sont toutes deux des causes possibles. Les bris de pièces de fonction critique, telles que les rails ou les disques de roue, sont extrêmement difficiles à prévoir et ont des causes multiples. Leur entretien préventif accompagné de contrôles réguliers est de rigueur, mais il a ses limites. En Suisse, les contrôles des trains et des wagons par les opérateurs de fret ferroviaire et les gestionnaires d’infrastructures et les contrôles effectués par plus de 250 installations de con-trôle des trains sont bien établis sur l’ensemble du territoire.
Poursuivre l’objectif de transfert
L’ampleur des répercussions d’un tel événement sur l’ensemble du système de transport et l’importance des dommages qu’il peut causer sont évidents. C’est pourquoi, au sein du groupe de travail sectoriel «CI sécurité», avec notre échange d’expériences ECM annuel et en collaboration avec l’Office fédéral des transports (OFT), nous entretenons une étroite coopération avec tous les acteurs pertinents du fret ferroviaire, afin de faire constamment évoluer l’état de la technique et d’améliorer encore le niveau de sécurité déjà très élevé. Nous suggérons d’aborder les questions et les mesures à venir sur la base du rapport que rendra le SESE. C’est la seule façon de réduire davantage le risque qu’un nouvel accident se produise, tout en poursuivant l’objectif, inscrit dans la Constitution, de transfert du trafic transalpin de marchandises. Il est donc d’autant plus impor-tant que le tunnel de base du Saint-Gothard puisse à nouveau être emprunté le plus rapidement possible, surtout dans la perspective de la reprise de l’économie italienne après la pause estivale. Par ailleurs, le recours à l’alternative du transport routier disponible et flexible est indispensable. Pour ce faire, nous proposons notre assistance, conjointement avec nos membres et nos parte-naires du secteur, dans l’organisation efficace des trafics de déviation et la reconfiguration des compositions.