Cet hom­mage se pro­po­se de vous mon­trer com­ment le fret fer­ro­vi­ai­re de la Suis­se s’achemine avec per­sé­vé­rance vers l’avenir. Durant de nombreu­ses années, l’innovation a été une noti­on incon­nue pour les «wagons bruns». Mais cette épo­que est révo­lue. Les ent­re­pri­ses de fret fer­ro­vi­ai­re sont prêtes à affron­ter l’ère 4.0 et à défend­re leur place sur les rails, indis­pensable pour garan­tir la sécu­ri­té d’approvisionnement, effec­tuer les trans­ports de maniè­re éco­lo­gi­que et sou­la­ger la route. 

Les enjeux:

  • Une ten­dance con­ti­nue à la hausse depuis 175 ans
  • Réa­li­se plus d’un tiers des trans­ports en Suis­se et à tra­vers la Suisse
  • Rétro­s­pec­ti­ve sur les cri­ses et suc­cès passés
  • Un siè­cle d’avance en matiè­re d’électrification


Depuis le début du 20e siè­cle, le volu­me du fret fer­ro­vi­ai­re a connu en Suis­se une évo­lu­ti­on impres­si­on­nan­te. Selon l’Office fédé­ral de la sta­tis­tique (OFS), il s’élevait au total en 1900 à 1,5 mil­li­ard de ton­nes-kilo­mè­tres. Depuis, le rail a été frap­pé par de nombreu­ses cri­ses, pour cer­tai­nes venues de très loin. Aujourd’hui, ce chif­fre s’élève à 10,4 mil­li­ards de ton­nes-kilo­mè­tres, ce qui repré­sen­te une part de 37 %[1] du split modal et donc un pilier important du sys­tème de trans­port suis­se. Mais rep­re­nons les cho­ses depuis le début.

Petit pays, grand volume de trafic: il reste encore un potentiel important

Le volu­me trans­por­té par le fret fer­ro­vi­ai­re a fluc­tué au cours des décen­nies (cf. ill. 1). Depuis la fin de la pan­dé­mie, il recom­mence à aug­men­ter sans dis­con­tin­uer. Dans le domaine du tra­fic tran­sal­pin (tran­sit), il exis­te un man­dat de trans­fert du tra­fic route-rail inscrit dans l’article de la Con­sti­tu­ti­on fédé­ra­le sur la pro­tec­tion des Alpes. Grâce à la con­s­truc­tion de la NLFA, du cor­ri­dor de quat­re mètres et d’un sou­ti­en finan­cier iné­dit du tra­fic com­bi­né non accom­pa­gné (TCNA), la Suis­se pré­sen­tait en 2021 un split modal très élevé de 74 % au pro­fit du rail dans le tra­fic tran­sal­pin; le volu­me trans­por­té par le fret fer­ro­vi­ai­re, qui repré­sen­tait 66 % du tra­fic de tran­sit, était par rap­port à d’autres pays une valeur record. Avec une part de 37 % pour le rail, le split modal glo­bal était lui aussi plus élevé qu’au niveau international.

Dans le tra­fic inter­ne, il n’y a pas de man­dat de trans­fert. Les tra­fics inté­ri­eur (2021: 23 %), d’importation (7,5 %) et d’exportation (3,5 %[2]) recè­lent un énor­me potentiel dor­mant, réa­li­sable à con­di­ti­on que soi­ent mises en œuvre une moder­ni­sa­ti­on et une réor­ga­ni­sa­ti­on inté­gra­les du tra­fic par wagons com­plets ainsi que la pro­mo­ti­on de la con­cur­rence intra­mo­da­le[3]. Cela impli­que l’automatisation et la digi­ta­li­sa­ti­on du sys­tème fer­ro­vi­ai­re, qui amè­ne­ront le tra­fic par wagons com­plets sur la voie de dépas­se­ment et ren­dront le rail prêt à affron­ter la con­cur­rence inter­mo­da­le et les chaî­nes logis­ti­ques mul­ti­mo­da­les. Cette avan­cée se verra enco­re ren­for­cée par une infra­struc­tu­re suf­fi­sam­ment dis­po­nible pour les ent­re­pri­ses de fret fer­ro­vi­ai­re et la mul­ti­pli­ca­ti­on des sites logis­ti­ques bien situés[4].

La poli­tique suis­se des trans­ports et de l’infrastructure doit donc davan­ta­ge se con­cen­trer sur les atouts du mode de trans­port «rail» pour les cli­ents du sec­teur des char­geurs. Plus le trans­port fer­ro­vi­ai­re de mar­chan­di­ses suis­se appor­te­ra des avan­ta­ges aux char­geurs, plus il sera uti­li­sé, et donc plus on aura un trans­fert du tra­fic de la route vers le rail. À la VAP, nous reje­tons en revan­che une poli­tique expli­ci­te de trans­fert du tra­fic dans le tra­fic intérieur.

Illus­tra­ti­on 1: Volu­me du fret fer­ro­vi­ai­re en Suis­se depuis 1900 (cli­quer sur l’i­mage pour l’agrandir)

Des montagnes russes, mais un gain d’altitude indéniable

Le 7 août 1847, on célèb­re l’inauguration du pre­mier che­min de fer pas­sant entiè­re­ment sur le sol suis­se et reli­ant Zurich à Baden, sur­nom­mé la «ligne du Spa­nisch Bröt­li»[5]  (cf. illus­tra­ti­on 2). L’une des rai­sons à l’origine de la con­s­truc­tion de cette ligne était que les bour­geois zurichois se fai­sai­ent appor­ter – de pré­fé­rence le diman­che – par leurs cour­siers une pâtis­se­rie en pâte feuil­le­tée d’un célèb­re maît­re bou­lan­ger de Baden bap­ti­sée «Spa­nisch Bröt­li». Les pau­vres ser­vi­teurs devai­ent tou­tes les semain­es prend­re à pied le che­min de Bade peu après minuit pour pou­voir dépo­ser ces petits pains tout frais sur la table du petit-déjeu­ner domi­ni­cal. La «ligne du Spa­nisch Bröt­li» per­met­tait de trans­por­ter rapi­de­ment et sûre­ment les mar­chan­di­ses et les per­son­nes.[6]

Illus­tra­ti­on 2: La Suis­se inau­gu­re sa pre­miè­re ligne de che­min de fer natio­na­le: la «ligne Spanisch-Brötli».

En Suis­se, les pre­miers chem­ins de fer nais­sent d’une initia­ti­ve pri­vée et leur explo­ita­ti­on démar­re grâce à une con­ces­si­on des can­tons qu’ils tra­ver­sent. Dans un pre­mier temps, la Con­fé­dé­ra­ti­on n’émet des direc­ti­ves que sur des ques­ti­ons tech­ni­ques. Elle se voit octroy­er ulté­ri­eu­re­ment davan­ta­ge de com­pé­ten­ces pour garan­tir un réseau natio­nal cohérent.

En 1857, on fait cir­cu­ler pour la pre­miè­re fois en Suis­se un wagon de la Poste dans le domaine des Chem­ins de fer du Nord-Est sur la ligne Zurich–Baden–Brugg. C’est la nais­sance de la poste fer­ro­vi­ai­re suis­se. En 1859, le réseau a déjà une longueur de plus de 1000 km, il exis­te une liai­son direc­te entre le lac de Con­s­tance et Genè­ve à laquel­le sont aussi reliés Berne, Lucer­ne, Coire, Saint-Gall, Schaff­house et Bâle. En 1882, les 15 km du tun­nel de faîte sont ache­vés et la ligne Saint-Got­hard est mise en service.

En 1875, la Suis­se pro­mul­gue la pre­miè­re loi sur la con­s­truc­tion et l’exploitation des voies fer­rées indus­tri­el­les, instau­rant ainsi une règle­men­ta­ti­on léga­le sur le sta­tut juri­di­que des voies de rac­cor­de­ment. Le 20 février 1898, la vota­ti­on popu­lai­re mar­que la fin de l’ère des chem­ins de fer pri­vés, et à par­tir de 1902, les chem­ins de fer publics, les CFF, tout récem­ment créés, rac­hè­tent les plus gran­des socié­tés fer­ro­vi­ai­res ainsi que des petits chem­ins de fer pri­vés. La natio­na­li­sa­ti­on trans­fè­re la responsa­bi­li­té du déve­lo­p­pe­ment des chem­ins de fer à la Con­fé­dé­ra­ti­on. Dans ce con­tex­te, le rachat de l’infrastructure par les CFF est une bonne décis­i­on. L’exploitation sur le réseau allait tou­te­fois être carac­té­ri­sée par la concurrence.

En 1912, la mono­po­li­sa­ti­on du trans­port fer­ro­vi­ai­re appel­le la créa­ti­on d’un orga­ne de repré­sen­ta­ti­on des acteurs pri­vés. C’est la nais­sance de la VAP Asso­cia­ti­on des pro­prié­tai­res suis­ses de voies de rac­cor­de­ments et de wagons de mar­chan­di­ses pri­vés – aujourd’hui appelée VAP Asso­cia­ti­on des char­geurs –, qui se mobi­li­se depuis lors pour une con­cur­rence loya­le et pour l’optimisation des con­di­ti­ons-cad­res éco­no­mi­ques, de l’infrastructure fer­ro­vi­ai­re et des sites logis­ti­ques. À l’époque, le rail con­court de maniè­re déter­mi­nan­te à la révo­lu­ti­on indus­tri­el­le: au fur et à mesu­re que croît l’infrastructure, ce mode de trans­port ren­ta­ble ne tarde pas à détrô­ner le bateau et la voitu­re à che­val. Un trans­port rapi­de à l’intérieur de la Suis­se, mais aussi vers l’Europe, ouvre de nou­vel­les pos­si­bi­li­tés économiques.

Lors de la Pre­miè­re Guer­re mon­dia­le, le volu­me du fret fer­ro­vi­ai­re com­mence par aug­men­ter, avant de dimi­n­uer de 18 % en 1917 puis de 14 % en 1918. Ces bais­ses s’expliquent par les inter­rup­ti­ons de la pro­duc­tion et du com­mer­ce ainsi que par les réper­cus­sions de la grip­pe espa­gno­le. En Suis­se, cette pan­dé­mie tou­che en deux vagues envi­ron la moi­tié de la popu­la­ti­on suis­se entre juil­let 1918 et juin 1919, faisant pres­que 25 000 morts. Dans les années 1920, le volu­me de trans­port se redres­se, avant de chu­ter à nou­veau en 1921, année de la crise éco­no­mi­que, puis lors du krach bour­sier de New York d’octobre 1929.

Le début de la Deu­xiè­me Guer­re mon­dia­le mar­que pour les ent­re­pri­ses de fret fer­ro­vi­ai­re un essor dû à la con­jon­c­tu­re d’armement et aux décis­i­ons poli­ti­ques[7].. On voit alors le tra­fic inté­ri­eur aug­men­ter, car le che­min de fer, entre-temps en majeu­re par­tie élec­tri­fié, rem­place le tra­fic par voitures et cami­ons, lar­ge­ment para­ly­sé par le man­que de car­bu­rant. Pen­dant la Deu­xiè­me Guer­re mon­dia­le, le volu­me de trans­port par rail recu­le con­sidé­ra­blem­ent jusqu’à un effondre­ment pres­que com­plet du fret de tran­sit à la fin de la guer­re et à une dimi­nu­tion du volu­me glo­bal du fret de 42 %.

Après la Deu­xiè­me Guer­re mon­dia­le, l’économie se redres­se et avec elle le volu­me du fret fer­ro­vi­ai­re, qui att­eint une valeur record dans les années 1970. Sui­vent les for­tes chu­tes impu­ta­bles à la crise pétro­liè­re, au krach bour­sier de 1987, à la crise de l’immobilier et à la réces­si­on qui en résul­te durant les années 1990. En 1999, dans le cadre de l’ouverture du mar­ché euro­pé­en pour le TCNA et s’appuyant sur la direc­ti­ve CE 91/440/CEE[8], la Suis­se lance la pre­miè­re de plu­s­ieurs étapes de ce que l’on appel­le la réfor­me des chem­ins de fer, dont l’objectif est d’organiser le sys­tème fer­ro­vi­ai­re suis­se de maniè­re plus effi­cace et plus au ser­vice de la clientèle.

La nou­vel­le loi sur les voies de rac­cor­de­ment du 5 octobre 1990 et l’ordonnance du 26 février 1992 visent à don­ner de nou­vel­les impul­si­ons à la pro­mo­ti­on du trans­port fer­ro­vi­ai­re de mar­chan­di­ses et à con­tri­buer à résoud­re de maniè­re ori­en­tée vers l’avenir les nombreux pro­blè­mes qui se posent dans le trans­port de marchandises.

En 2000, le volu­me du fret fer­ro­vi­ai­re est de cinq fois supé­ri­eur à sa valeur de 1950 (+ 397 %). Cette aug­men­ta­ti­on est d’autant plus impres­si­on­nan­te que la part du rail dans l’ensemble du trans­port de mar­chan­di­ses a pour­tant mas­si­ve­ment dimi­n­ué durant cette péri­ode au pro­fit du trans­port rou­tier. En effet, mal­gré l’expérience de la pénurie de car­bu­rant pen­dant la Deu­xiè­me Guer­re mon­dia­le, on assis­te après guer­re au pas­sa­ge à une éco­no­mie basée sur le pétrole.

La Nou­vel­le ligne fer­ro­vi­ai­re à tra­vers les Alpes (NLFA) a elle aussi donné un coup de fouet au tra­fic. Avec trois tun­nels de base tra­vers­ant les Alpes et le déve­lo­p­pe­ment des lignes d’accès, elle a rappro­ché le Nord et le Sud de la Suis­se et de l’Europe. Le tun­nel de base du Lötsch­berg est en ser­vice depuis 2007. Celui du Saint-Got­hard a été ouvert en 2016. En 2020, la mise en ser­vice de la NLFA a mar­qué l’achèvement du tun­nel de base du Ceneri.

Ambi­ance 2008–2012

Pour vous replon­ger au plus pro­che de l’actualité de l’époque, nous avons résu­mé pour vous le con­tenu des expo­sés tenus lors de nos AG de 2008, 2010 et 2012:

2008: AG VAP, allo­cu­ti­on du pré­si­dent Franz Steinegger 

En matiè­re de fret fer­ro­vi­ai­re, la poli­tique suis­se des trans­ports est sous-ten­due de con­tra­dic­tions. D’une part, on inves­tit des mil­li­ons de francs dans le tra­fic de tran­sit entre l’Allemagne et l’Italie, si celui-ci est réa­li­sé sous forme de trans­port com­bi­né ou de chaus­sée rou­lan­te. D’autre part, en matiè­re de tra­fic inté­ri­eur, le trans­port de voy­a­ge­urs est sub­ven­ti­onné par une règle­men­ta­ti­on erro­n­ée du prix des sil­lons, et le trans­port fer­ro­vi­ai­re de mar­chan­di­ses s’en trouve désa­van­ta­gé. En Suis­se, le char­geur ne se voit en outre rem­bour­ser une somme for­fai­taire de la RPLP que s’il appor­te ses mar­chan­di­ses au train dans un con­tai­ner, ce qui sub­ven­ti­on­ne enco­re davan­ta­ge le tra­fic de tran­sit. L’Association suis­se des char­geurs (VAP) récla­me une poli­tique glo­ba­le de trans­fert du tra­fic qui pren­ne aussi en comp­te des cri­tères éco­lo­gi­ques. Pour ce faire, il faut amé­lio­rer les prix des sil­lons, les prio­ri­tés d’accès, les capa­ci­tés des voies, l’application du prin­ci­pe de cau­sa­li­té lors des réno­va­tions de lignes et une éva­lua­ti­on du tra­fic par wagons com­plets en fon­c­tion des beso­ins. La VAP souli­gne éga­le­ment que les beso­ins du trans­port de mar­chan­di­ses ne doi­vent pas être sous-esti­més dans le déve­lo­p­pe­ment futur des pro­jets ferroviaires.

2010: AG VAP, expo­sé de Moritz Leuenberger

Le fret, responsable du trans­port des mar­chan­di­ses, est sou­vent igno­ré par beau­coup. Alors que la plu­part des gens ne se sou­ci­ent pas de l’origine ni de l’histoire de la fabri­ca­ti­on des mar­chan­di­ses, ils ne sont sou­vent pas non plus infor­més de la maniè­re dont le trans­port et la logis­tique se dérou­lent. Le texte mont­re que le trans­port de mar­chan­di­ses par le rail est désa­van­ta­gé par rap­port au tra­fic de voy­a­ge­urs et se voit sou­vent offrir trop peu de sou­ti­en poli­tique. Les fonds publics dimi­nuent alors que les trans­ports de mar­chan­di­ses aug­men­tent de maniè­re expo­nen­ti­el­le, tant par le rail que par la route. Leu­en­ber­ger pro­po­se de repen­ser la hié­rar­chie des prio­ri­tés sur le réseau fer­ro­vi­ai­re afin de ren­forcer le trans­port de mar­chan­di­ses, pré­cis­ant que la Con­fé­dé­ra­ti­on avait pris des mesu­res pour sou­te­nir le fret, dont le ZEB et Rail 2030.

2012: AG VAP: Expo­sé de Franz Stein­eg­ger, pré­si­dent de la VAP

Le pré­si­dent a der­riè­re lui une longue car­ri­è­re dans la poli­tique des trans­ports et se sou­vi­ent des dis­cus­sions sur divers pro­jets tels que Rail 2000, le tun­nel de la Ver­ei­na, la NLFA et l’article sur la pro­tec­tion des Alpes. Il con­sta­te que l’augmentation du tra­fic de mar­chan­di­ses et de voy­a­ge­urs grim­pe­ra de 60 % d’ici 2030 et que l’infrastructure doit sui­v­re la hausse de la deman­de de mobi­li­té. Il y a tou­te­fois des limi­tes finan­ciè­res et éco­lo­gi­ques, et il se pose la ques­ti­on de savoir s’il est pos­si­ble de mett­re à dis­po­si­ti­on l’offre infra­struc­tu­rel­le néces­saire. L’auteur cri­tique le fait que les poli­ti­ci­ens et les asso­cia­ti­ons pré­fè­rent réflé­chir aux moy­ens de con­trô­le et aux prio­ri­tés d’utilisation des infra­struc­tures existan­tes plu­tôt que de se pen­cher sur l’avenir. Pour les chem­ins de fer, il exis­te des plans tels que Rail 2030 et un pro­gram­me de déve­lo­p­pe­ment stra­té­gique de l’infrastructure fer­ro­vi­ai­re (STEP) com­portant 42 mil­li­ards de francs d’investissements. La route a elle aussi des pro­po­si­ti­ons de finance­ment. La Suis­se est le pays d’Europe qui inves­tit le plus dans le réseau fer­ro­vi­ai­re par habitant.

Extrait de la publi­ca­ti­on commémorative:

La loi fédé­ra­le et la Con­ven­ti­on de Berne ont sou­tenu le fret fer­ro­vi­ai­re dans le tra­fic natio­nal et inter­na­tio­nal. Le fret fer­ro­vi­ai­re se trouve néan­mo­ins con­fron­té à une rude con­cur­rence avec le fret rou­tier et le trans­port de voy­a­ge­urs, ce qui affai­blit de plus en plus la com­pé­ti­ti­vi­té du tra­fic fer­ro­vi­ai­re de mar­chan­di­ses. La poli­tique suis­se des trans­ports vise à trans­fé­rer les tra­fics de fret de la route sur le rail, ce qui exige une infra­struc­tu­re bien amé­na­gée et des con­di­ti­ons d’accès équi­ta­bles au réseau. Pour res­ter com­pé­ti­tif, il faut éga­le­ment une con­cur­rence intra­mo­da­le et des inci­ta­ti­ons de l’État ainsi qu’une ana­ly­se cri­tique de l’organisation de l’infrastructure fer­ro­vi­ai­re et des ent­re­pri­ses fer­ro­vi­ai­res. La VAP con­sidè­re comme un défi et une obli­ga­ti­on le fait d’équilibrer la dis­cus­sion sur le trans­fert du tra­fic dans l’intérêt du site éco­no­mi­que et de l’espace de vie qu’est la Suisse.

 

Les atten­tats de 2001 aux États-Unis sont sui­vis d’un recul de 4 %. Suite à la crise finan­ciè­re de 2008 engen­drée par l’éclatement de la bulle immo­bi­liè­re amé­ri­cai­ne, le volu­me du fret baisse de 14 % en 2009. Lors de la crise con­jon­c­tu­rel­le de 2012 qui suit l’introduction du taux de chan­ge mini­mum de l’euro, on con­sta­te un nou­veau recul de 4 %. La fer­me­tu­re de la Rhein­tal­bahn (infil­tra­ti­on d’eau dans le tun­nel de Ras­tatt) a ent­raî­né en 2017 une baisse de 6 %. Dans le même ordre de gran­deur, on a enre­gis­tré une baisse du fret fer­ro­vi­ai­re de 5 % lors de l’année de la pan­dé­mie de coro­na­vi­rus, en 2020. En 2021, le fret fer­ro­vi­ai­re a aug­men­té de 6,2 % (10,4 mil­li­ards de tonnes-kilomètres).

Électrification: un siècle d’avance

À l’époque de leur fon­da­ti­on, les chem­ins de fer fon­c­tion­nent au char­bon. En 1888, le tram­way Vevey-Mon­treux-Chil­lon (VMC) est le pre­mier train à trac­tion élec­tri­que à cir­cu­ler en Suis­se. Sui­vent pro­gres­si­ve­ment d’autres chem­ins de fer à voie étroi­te. En 1901, à l’occasion de l’assemblée géné­ra­le de l’Association suis­se des élec­tri­ci­ens, il est deman­dé de véri­fier aussi la faisa­bi­li­té d’une élec­tri­fi­ca­ti­on des chem­ins de fer à voie normale.

Illus­tra­ti­on 3: Le tram­way Vevey-Mon­treux-Chil­lon, pre­mier train élec­tri­que de Suis­se, est mis en ser­vice en 1888. © Lau­rent Croset

Selon la com­mis­si­on d’étude pour une explo­ita­ti­on fer­ro­vi­ai­re élec­tri­que, qui verra le jour ulté­ri­eu­re­ment, l’initiateur de cette pro­po­si­ti­on est «prin­ci­pa­le­ment guidé par la néces­si­té de rend­re notre pays moins dépen­dant des pays pro­duc­teurs de char­bon et d’offrir un nou­veau champ d’activité à l’industrie élec­tro­tech­ni­que suis­se». En 1912, la com­mis­si­on d’étude elle-même avan­ce comme prin­ci­pal motif dans son rap­port à la direc­tion géné­ra­le des CFF «l’utilisation des forces hydrau­li­ques natio­na­les au lieu du char­bon étran­ger et, si pos­si­ble, une réduc­tion du prix de l’exploitation». Dès 1906 et 1913, on met en ser­vice les dif­fé­ren­tes sec­tions élec­tri­fiées de l’axe du Loetschberg-Simplon.

La pénurie de char­bon qui a sévi durant la Pre­miè­re Guer­re mon­dia­le fait avan­cer l’électrification du che­min de fer. En 1920, le che­min de fer du Saint-Got­hard est mis en ser­vice sous forme élec­tri­fiée et en 1928, plus de la moi­tié des lignes des CFF sont con­ver­ties à l’électricité. Dès l’entre-deux-guerres, la Suis­se joue à l’échelon inter­na­tio­nal un rôle de pre­mier plan en matiè­re d’électrification des chem­ins de fer. Pour des rai­sons mili­taires, une nou­vel­le vague d’électrification a lieu pen­dant la Deu­xiè­me Guer­re mon­dia­le. Une nou­vel­le par­tie du réseau, très vaste, est élec­tri­fiée en un laps de temps extrê­me­ment court. Cette élec­tri­fi­ca­ti­on se pour­su­it après la fin de la guer­re afin de pré­ve­nir le chômage.

Du point de vue actuel, l’électrification a éga­le­ment été une bonne décis­i­on pour la pro­tec­tion du cli­mat, même si cet argu­ment ne jouait aucun rôle à l’époque. Aujourd’hui, la pro­tec­tion du cli­mat est le moteur prin­ci­pal du trans­fert du tra­fic et de l’électrification des trans­ports. Par rap­port au trans­port rou­tier, le rail béné­fi­cie à cet égard d’environ un siè­cle d’avance.


[1] Cf. OFT: Trans­port de marchandises

[2] Cf. OFT: Trans­port de mar­chan­di­ses par rail

[3] Cf. artic­le du blog «Per­fec­tion­ne­ment du trans­port de mar­chan­di­ses::il est grand temps de faire quel­que chose»

[4] Cf. artic­le du blog «Exter­na­li­ser le der­nier kilo­mèt­re et l’organiser de maniè­re non dis­cri­mi­na­toire»

[5] Cf. «Die Spa­nisch-Bröt­li-Bahn», Peter Affol­ter (en allemand)

[6] Le terme de Baden­fahrt (voya­ge à Baden) dési­gne deux importants évè­ne­ments his­to­ri­ques à la fois: d’une part le pre­mier voya­ge fer­ro­vi­ai­re de Suis­se, entre Zurich et Baden, et d’autre part la légend­ai­re fête forai­ne. Celle-ci célè­bre­ra cette année du 18 au 27 août 2023 son 100e anni­ver­saire (badenfahrt.ch).

[7] On pour­rait à cet égard s’interroger sur la com­pa­ti­bi­li­té de ces décis­i­ons avec le main­ti­en de la neu­tra­li­té suis­se, mais nous ne nous éten­drons tou­te­fois pas sur ce sujet dans le cadre de cet article.

[8] Cf. direc­ti­ve CE 91/440 rela­ti­ve au déve­lo­p­pe­ment de chem­ins de fer communautaires

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