Le contexte

Le tra­fic est en aug­men­ta­ti­on. Par con­sé­quent, les capa­ci­tés de l’infrastructure de tra­fic existan­tes ne suf­fi­ront pas tou­jours ni par­tout à satis­fai­re la deman­de. Cer­tes, la Con­fé­dé­ra­ti­on, les can­tons, les com­mu­nes et les ent­re­pri­ses de trans­port met­tent en œuvre des mesu­res variées pour que la mobi­li­té reste pos­si­ble dans l’avenir (p. ex. ges­ti­on du tra­fic, exten­si­on). Beau­coup de ces mesu­res se heur­tent tou­te­fois à leurs limites.

Une mesu­re de réso­lu­ti­on de la surchar­ge de tra­fic est jusqu’ici lar­ge­ment res­tée inutili­sée en Suis­se: les sys­tè­mes de prix dif­fé­ren­ciés, p. ex. sous forme de rede­van­ce de mobi­li­té varia­ble en fon­c­tion du moment ou du lieu. Cela revi­en­drait à aban­don­ner les tarifs uni­ques ou for­fai­taires. Ce que l’on appel­le la tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té (Mobi­li­ty Pri­cing) influence la deman­de en tra­fic et le com­porte­ment de mobi­li­té, per­met­tant ainsi au bout du comp­te de gérer les capa­ci­tés de trans­port existan­tes de maniè­re ciblée.

Les bases légales

Par son pro­jet de «Loi fédé­ra­le sur les pro­jets pilo­tes de tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té» du 3 février 2021, le Dépar­te­ment fédé­ral de l’environnement, des trans­ports, de l’énergie et de la com­mu­ni­ca­ti­on DETEC vise à créer une base léga­le auto­ri­sant les can­tons, les vil­les et les com­mu­nes à réa­li­ser loca­le­ment et pen­dant une péri­ode déter­mi­née des pro­jets pilo­tes de tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té avec assu­jet­tis­se­ment à une rede­van­ce. Ces pro­jets doi­vent per­mett­re d’acquérir des con­nais­sances sur des for­mes de tari­fi­ca­ti­on d’un nou­veau genre, desti­nées à influen­cer de maniè­re ciblée la deman­de de trans­port et les habi­tu­des de dépla­ce­ment des usa­gers dans le domaine du tra­fic indi­vi­du­el moto­ri­sé et dans les trans­ports publics.

Prise de position de la VAP

La VAP sou­ti­ent les prin­cipes fon­da­men­taux énon­cés dans les travaux de la Con­fé­dé­ra­ti­on sur le con­cept, notam­ment le prin­ci­pe «pay as you use» avec com­pen­sa­ti­on com­plè­te. Selon ces prin­cipes, les usa­gers des trans­ports ne pai­e­r­ont pas plus, mais dif­fé­rem­ment. De même, nous sou­te­nons les appro­ches de l’intermodalité et de l’effet de répar­ti­ti­on, selon les­quel­les la route et le rail sont entiè­re­ment inté­g­rés et avec les mêmes cri­tères, la mobi­li­té res­tant tou­te­fois aborda­ble; tout cela dans le cadre d’un agence­ment éche­lon­né, trans­pa­rent et com­pré­hen­si­ble des éléments.

La VAP refu­se tou­te­fois une ges­ti­on des capa­ci­tés sur les infra­struc­tures existan­tes sans com­pen­sa­ti­on com­plè­te. De même, la tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té ne doit pas être uti­li­sée pour dimi­n­uer le tra­fic ni pour pilo­ter le split modal, car la Con­sti­tu­ti­on ne per­met pas cette option.

Le trans­fert du tra­fic réus­si­ra s’il exis­te des off­res et des inci­ta­ti­ons suf­fi­sam­ment avan­ta­ge­u­ses. Les solu­ti­ons logis­ti­ques mul­ti­mo­da­les, notam­ment, recè­lent un potentiel con­sidé­ra­ble à cet égard. Le trans­fert du tra­fic peut donc être réa­li­sé en amé­lio­rant les con­di­ti­ons-cad­res et les capa­ci­tés des infra­struc­tures pour les solu­ti­ons logis­ti­ques mul­ti­mo­da­les. Outre le fret pure­ment fer­ro­vi­ai­re, il con­vi­ent d’accorder une atten­ti­on par­ti­cu­liè­re aux solu­ti­ons logis­ti­ques mul­ti­mo­da­les Rhin-rail, Rhin-route, route-rail, pipe­line-rail, pipe­line-route et aux solu­ti­ons cor­re­spond­an­tes dans le domaine de la logis­tique urbai­ne. Dans ces cas, des rem­bour­se­ments géné­reux des rede­van­ces de mobi­li­té pour les trans­bor­de­ments sup­p­lé­men­tai­res de mar­chan­di­ses et de con­teneurs peu­vent con­tri­buer à évi­ter les effets exter­nes et à rédui­re les pollutions.

Dans le cadre du Cargo Forum Suis­se, nous avons adres­sé le 17 mai 2021 notre prise de posi­ti­on sur la loi fédé­ra­le sur les pro­jets pilo­tes de tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té à la con­seil­lè­re fédé­ra­le Simo­net­ta Sommaruga.

Le projet de loi présente des failles méthodologiques 

Le pro­jet du DETEC ne donne pra­ti­quement pas de direc­ti­ves con­cer­nant les moda­li­tés d’expérimentation ni sur les hypo­thè­ses à tes­ter en détail. Pour les pro­jets pilo­tes assu­jet­tis à une rede­van­ce, l’influence de la Con­fé­dé­ra­ti­on se limi­te à l’examen et à l’approbation des pro­jets. À cet égard, l’influence de la Con­fé­dé­ra­ti­on quant à des ens­eig­ne­ments à large échel­le, comme le sti­pu­le l’art. 17 du pro­jet, est très limi­tée. Il n’est même pas posé comme con­di­ti­on que plu­s­ieurs pro­jets pilo­tes doi­vent pou­voir être com­pa­rés entre eux. On ne peut donc pas comp­ter avoir sur les dif­fé­ren­tes thè­ses des résul­tats pro­bants pro­ven­ant de dif­fé­ren­tes régions. Dans le cas des pro­jets pilo­tes repo­sant sur une par­ti­ci­pa­ti­on volon­tai­re, la mise en œuvre sem­ble même pos­si­ble sans examen au sens de l’art. 26, si l’on renon­ce à recour­ir à des con­tri­bu­ti­ons fédé­ra­les. Ces fail­les doi­vent être palliées.

La loi distin­gue les pro­jets pilo­tes du domaine du tra­fic indi­vi­du­el moto­ri­sé et ceux du domaine des trans­ports publics (art. 3, art. 6 et art. 9). Cette distinc­tion est incom­pa­ti­ble avec les prin­cipes fon­da­men­taux de la tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té. Les pro­jets pilo­tes doi­vent être orga­ni­sés de maniè­re à ce que le tra­fic indi­vi­du­el et les trans­ports publics puis­sent en quel­que sorte être testés.

La loi con­çoit la rede­van­ce volon­tai­re ou obli­ga­toire de tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té comme ven­ant s’ajouter aux rede­van­ces actu­el­le­ment en vigueur (cf. art. 11 «Inter­dic­tion d’abaisser les tarifs»). Ceci est en con­tra­dic­tion avec l’exigence de compensation.

L’article 12 de la loi pré­voit un pai­ement anony­me uni­quement pour les pro­jets pilo­tes du domaine des trans­ports publics. Cette exi­gence doit éga­le­ment s’appliquer au tra­fic indi­vi­du­el motorisé.

Les pro­jets pilo­tes ne portent pas sur le tra­fic lourd fer­ro­vi­ai­re et rou­tier d’un poids total de plus de 3,5 t. Par con­sé­quent, les respons­ables des pro­jets de trans­port de mar­chan­di­ses ne peu­vent recu­eil­lir que des expé­ri­en­ces très limitées.

La VAP demande un prix lié aux prestations – un concept global est nécessaire

Nous som­mes con­sci­ents que les méca­nis­mes de finance­ment existants ne per­met­tent pas une tari­fi­ca­ti­on de la mobi­li­té liée aux pre­sta­ti­ons. En con­sé­quence, les coûts réels et le degré d’autofinancement vari­ent très for­te­ment d’un mode de trans­port à l’autre ainsi qu’entre le tra­fic lourd de mar­chan­di­ses et le trans­port de voy­a­ge­urs, et ils con­ti­en­nent de mau­vai­ses inci­ta­ti­ons en matiè­re de mobi­li­té et de déve­lo­p­pe­ment ter­ri­to­ri­al en Suisse.

La VAP recom­man­de donc un con­cept glo­bal pour la struc­tu­ra­ti­on future des rede­van­ces de mobi­li­té. Ce faisant, il con­vi­en­dra de rema­nier les mesu­res rela­ti­ves aux dif­fér­ents sous-objec­tifs en évi­tant les con­flits d’intérêts et en ten­ant comp­te de tous les déve­lo­p­pe­ments techniques.

En tant que porte-paro­le du sec­teur des char­geurs, nous adhé­rons aux prin­cipes suivants:

  • La logis­tique et le trans­port de mar­chan­di­ses – notam­ment le fret rou­tier – sont des fac­teurs essentiels de la per­for­mance de la Suis­se comme site éco­no­mi­que inté­g­ré dans un réseau inter­na­tio­nal et de l’approvisionnement du pays. La poli­tique d’urbanisation, de trans­port et d’infrastructure doit con­tin­uer à garan­tir cela.
  • Le tra­fic (de mar­chan­di­ses) est géré d’une maniè­re aussi axée que pos­si­ble sur les beso­ins et aussi respec­tueu­se que pos­si­ble de l’environnement et des ressources.
  • Les con­di­ti­ons-cad­res et le déve­lo­p­pe­ment des infra­struc­tures con­tri­buent à la réa­li­sa­ti­on des deux pre­miè­res pré­mis­ses grâce à des inci­ta­ti­ons, des capa­ci­tés d’infrastructure suf­fi­san­tes et à la pro­mo­ti­on des innovations.
  • Les coûts d’infrastructure et de trans­port sont sou­mis au prin­ci­pe de cau­sa­li­té. Idéa­le­ment, tous les usa­gers du trans­port de voy­a­ge­urs et du trans­port de mar­chan­di­ses cou­vrent leurs coûts d’exploitation et d’infrastructure ainsi que les coûts d’origine exter­ne (prin­ci­pe du solde).

Pro­jet de con­sul­ta­ti­on et rap­port expli­ca­tif du DETEC:
https://www.astra.admin.ch/astra/fr/home/themes/mobility-pricing/vernehmlassungsunterlagen.html

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