Pour l’économie et la société suisses, une bonne accessibilité et un système de mobilité qui fonctionne bien sont des atouts importants pour le site national. Avec l’infrastructure de données sur la mobilité (IDM), la Confédération entend créer les conditions qui permettront une simplification des échanges de données sur la mobilité. L’association des chargeurs VAP se félicite de cette initiative, même si le chemin qui mènera au but s’avère jonché d’embûches.
Les enjeux:
- Utiliser les données pour la mise en réseau des acteurs de la mobilité
- Les acteurs doivent participer au financement à moyen terme
- Une nouvelle loi fédérale crée un cadre juridique et génère de la confiance
- La Confédération fait un pas en avant courageux
- Il reste des obstacles importants à surmonter
- En dépit de tous les obstacles, la VAP se félicite de l’initiative
Utiliser les données pour la mise en réseau des acteurs de la mobilité
À l’ère du numérique, la mise en réseau est cruciale. Cela vaut aussi et surtout pour la mobilité. À cet effet, il est indispensable de disposer de données de bonne qualité. Le projet IDM de la Confédération a pour but de mettre en réseau les acteurs de tous les secteurs de la mobilité et de tous les échelons administratifs. Le but consiste à fournir des données et des interfaces standardisées ainsi que des services numériques. Le 30 juin 2025, la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national (CTT‑N) a procédé aux auditions de différents acteurs ayant des interfaces avec le secteur de la mobilité.
Les acteurs doivent participer au financement à moyen terme
Les besoins en ressources et en finances s’élèvent sur plus de 12 ans à 25 millions de francs par an en moyenne. En raison de la structure progressive et de l’augmentation de la complexité de l’IDM, les besoins annuels augmenteront continuellement et passeront de 17 millions de francs au départ à quelque 33 millions de francs. L’IDM est financée pour moitié par le fonds d’infrastructure ferroviaire (FIF) et pour moitié par le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA). Vu l’utilité économique de l’IDM, la Confédération prévoit qu’au bout de 12 ans, les acteurs économiques profitant des données et des services participeront également au financement.
Une nouvelle loi fédérale crée un cadre juridique et génère de la confiance
En proposant la nouvelle loi fédérale concernant l’infrastructure de données sur la mobilité (LIDMo) comme cadre juridique ainsi que l’organisation future, le législateur entend susciter la confiance des acteurs envers l’IDM. Pour ce faire, il a formulé des principes primordiaux tels que la neutralité, l’indépendance, l’ouverture, le volontariat, la participation, l’orientation sur les besoins, l’absence de discrimination, la transparence, la fiabilité, la pérennité, la qualité, la protection des données, la sécurité des données, l’«open source» (logiciels libres) et le «design-to-cost» (conception à coût objectif).
La Confédération fait un pas en avant courageux
Les efforts courageux de la Confédération dans la mise à disposition de l’IDM méritent d’être salués. Il est temps que quelqu’un ose faire ce pas en avant radical pour ce sujet important et s’attelle à la tâche de rassembler et de mettre à disposition sous une forme standardisée les innombrables données qui se présentent dans une très grande diversité de formats et de granularités. En effet, ces données ne sont d’une véritable utilité que si une part aussi large que possible des acteurs fournissent des données et les mettent à disposition d’un cercle d’utilisateur aussi large que possible sous une forme standardisée. Aussi prometteur que paraisse le projet de la Confédération en théorie, sa mise en œuvre sera un défi non moindre. On le remarque aussi au fait que sur ce sujet, pratiquement personne ne se laisse aller à une grande euphorie. Pourquoi?
Il reste des obstacles importants à surmonter
À première vue, le projet suscite de grandes attentes. Si on le considère dans le détail, on remarque toutefois que la complexité augmente rapidement au fur et à mesure que l’on avance dans la concrétisation – ce qui n’est pas inhabituel avec les projets informatiques.
Une pierre d’achoppement essentielle est ce que l’on appelle le «double volontariat». Double, car d’une part, les acteurs décident eux-mêmes s’ils souhaitent recourir à l’IDM pour fournir des données, en échanger ou en obtenir. Deuxièmement, dans le cas d’une fourniture de données via l’IDM, les acteurs peuvent encore déterminer quelles données ils souhaitent divulguer en tant que données publiques («open data») ou mettre à disposition de manière restrictive («restricted data»). De l’avis des acteurs, un certain scepticisme est parfaitement compréhensible. En effet, quelle entreprise souhaiterait mettre à la disposition du grand public ou de ses concurrents des informations confidentielles ou sensibles pour la sécurité?
C’est précisément ce volontariat qui risque de faire échouer l’IDM. En effet, l’utilité des données fournies est fortement corrélée à leur exhaustivité. C’est bien pour cette raison que l’on a créé une base légale sur l’obligation de fournir des informations, par exemple pour les recueils de données de l’Office fédéral de la statistique. Il y a en outre le risque que la Confédération propose les données dans une granularité trop faible ou trop élevée. Dans ce cas, soit les données ne répondraient pas aux exigences, soit on collecterait des données inutilement détaillées. Ces deux cas de figure sont insatisfaisants.
Pour l’association des chargeurs (VAP), le cas d’application s’avère intéressant pour identifier les capacités libres dans le trafic de marchandises par wagons complets. D’autant plus que lors de sa session de printemps 2025, le Parlement a adopté la révision totale de la loi sur le transport de marchandises (LTM), qui s’est donné pour objectif que les trafics par wagons complets isolés puissent s’autofinancer. Dans cette démarche, une meilleure utilisation des capacités disponibles serait une étape importante.
Réaliser cet objectif est ambitieux, car il existe toutes sortes de capacités. Tout comme il se pose toutes sortes de questions. Par exemple celle de savoir si des capacités sont disponibles sur quel site, pour quelle destination, pour quel type de wagon (les capacités d’un wagon de marchandises en vrac ne sont pas les mêmes que celles d’un wagon à parois coulissantes) et à quel moment. Il faudrait que quelqu’un recueille ces données «proprement» et les mette à la disposition de l’IDM. Une chose est sûre: à ce jour, presque personne n’a tout cela en tête.
En dépit de tous les obstacles, la VAP se félicite de l’initiative
La VAP se félicite que la Confédération s’attaque au sujet crucial de l’accessibilité des données standardisées et donc à la question de la digitalisation. Ce n’est pas parce que le chemin est parsemé d’embûches que l’on peut se permettre d’ignorer le sujet. Et c’est justement parce les questions importantes n’ont pas encore de réponse qu’il est primordial que la Confédération rassemble autour d’une table les acteurs censés un jour utiliser ces données. Car enfin, la réussite ou l’échec dépendra de la disposition des entreprises à contribuer à la transmission des données et à les utiliser ensuite elles-mêmes à partir de l’IDM. Cela débouche sur la réciprocité: ceux qui contribuent se voient donner quelque chose en retour.
Ce n’est que si les acteurs voient dans l’IDM une plus-value qu’ils seront prêts, au bout de 12 ans, à financer une plus grande partie de l’IDM. Enfin, il faut espérer que l’initiative de la Confédération incitera d’autres entreprises du secteur privé à s’intéresser de plus près au sujet de la fourniture des données et à la digitalisation.