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Session de printemps 2025: peut-être la dernière chance pour le trafic par wagons complets isolés
Lors de la session de printemps 2025, le Conseil national et le Conseil des États ont éliminé les divergences qui les opposaient dans leurs efforts pour réviser la loi sur le transport de marchandises (LTM). À la VAP, nous nous félicitons de l’adoption définitive de ce dossier. Le Parlement ouvre ainsi la voie à l’autofinancement, à davantage de marché et à plus de concurrence dans le trafic par wagons complets isolés (TWCI). Il appartient désormais à tous les acteurs de saisir cette chance, qui est peut-être la dernière.
Les enjeux:
- Le Parlement débloque des subventions conséquentes
- Les conseils éliminent définitivement leurs divergences
- Un pas décisif vers plus de transparence et de concurrence est franchi
- Tous les acteurs du TWCI sont sollicités – tout particulièrement l’un d’entre eux
Le Parlement débloque des subventions conséquentes
Le 17 mars 2025, les deux chambres ont achevé leurs délibérations sur la révision de la LTM. En révisant intégralement la loi, le Conseil fédéral et le Parlement souhaitent soutenir le secteur du fret ferroviaire pour une durée limitée dans le temps (cf. article du blog «LTM: le cap est le bon, mais le chemin reste parsemé d’embûches.») En débloquant 260 millions de CHF sur quatre ans à compter 2026, l’organe législatif donne au secteur du temps pour augmenter son efficacité avec de nouveaux instruments. L’encouragement du TWCI est limité à huit ans.
Des subventions seront également allouées au couplage automatique digital (DAC), dont l’instauration sera soutenue par un crédit unique de 180 millions de CHF. Les mesures prévues ne devraient pas peser davantage sur le budget, car elles sont financées par des fonds provenant de la redevance sur le trafic des poids lourds.
Les conseils éliminent définitivement leurs divergences
Un objectif de transfert proposé au Conseil national par le centre gauche a été peu de temps après à nouveau supprimé par le Conseil des États. Une proposition minoritaire, qui visait une stabilisation de la part des transports de marchandises par le rail, n’a elle non plus pas obtenu la majorité. À l’instar du Conseil des États, une majorité de centre droit a aussi supprimé le 16 mars 2025 au Conseil national cet objectif du projet de loi, qui est ainsi définitivement abandonné. Le Conseil fédéral a actuellement déjà un mandat de transfert du trafic route-rail pour le fret transalpin, mais pas pour le TWCI.
Un pas décisif vers plus de transparence et de concurrence est franchi
Fort heureusement, le Parlement a approuvé d’autres propositions du Conseil des États destinées à renforcer la concurrence dans le TWCI, encourager la transparence et limiter les dépenses. Il faudra ainsi empêcher les subventionnements transversaux provenant de l’offre de TWCI soutenue par l’État vers les domaines non subventionnés des entreprises ainsi que les autres distorsions du marché de la part des fournisseurs de TWCI. À cet effet, la Confédération définira et surveillera les mesures organisationnelles correspondantes. Par ailleurs, CFF Cargo devra offrir les prestations fournies en TWCI à des conditions de marché et publier chaque année dans son rapport d’activité les flux financiers, l’évolution des coûts et des recettes dans le TWCI ainsi que des indicateurs d’autofinancement. C’est l’Office fédéral des transports (OFT) qui sera responsable de mettre en place les dispositions nécessaires pour le suivi de la réalisation des objectifs.
Tous les acteurs du TWCI sont sollicités – tout particulièrement l’un d’entre eux
Le DAC ne pourra mener à lui seul le TWCI à l’autofinancement. Pour que la LTM révisée déploie ses effets, il est nécessaire que toutes les forces impliquées contribuent à l’augmentation de la productivité. La responsabilité principale de la réussite de la réalisation des objectifs incombe à CFF Cargo. En effet, la filiale de fret du groupe CFF dispose sans aucun doute du plus puissant levier permettant d’atteindre l’autofinancement dans le TWCI.

Entretien avec David Zindo, STREEM Group / Ermewa
Questions pour David Zindo: PDG de Streem et Président de l’UIP
Lors de sa visite chez Ermewa à Paris, David Zindo, CEO du groupe STREEM et président de l’UIP, l’association internationale des détenteurs de wagons de marchandises, a répondu aux questions de notre directeur Simon Wey. Au cours de l’entretien, David Zindo explique non seulement sa vision du fret ferroviaire de demain et les obstacles à surmonter, mais aussi à quel point son travail, les gens et les thèmes de la branche lui tiennent à cœur.
- CEO du groupe STREEM
- Plus de 15 ans d’expérience dans le secteur ferroviaire.
- Chez STREEM depuis 2015.
- Employeurs précédents : EY, Groupe Veolia SNCF
- Président de l’UIP – International Union of Wagon Keepers

Vous êtes président de l’Union Internationale des Détenteurs de Wagons. Quel parcours professionnel vous a conduit à votre poste actuel ?
David Zindo: J’ai commencé comme auditeur financier chez EY en 1996, puis j’ai occupé des postes financiers chez Geodis, Veolia et SNCF avant de rejoindre Ermewa en 2015 comme Directeur Général et puis, comme Président. J’ai rejoint le Conseil d’Administration de l’UIP en décembre 2015 et j’en ai pris la présidence en juin 2023.
Qu’est-ce qui vous fascine dans le transport du fret ferroviaire ? Qu’est-ce qui vous frustre ?
Je suis fasciné par le potentiel d’efficacité, de sécurité et de décarbonation du transport du fret ferroviaire, et frustré par le fait que nous ne soyons pas en mesure d’exploiter ce potentiel concrètement.
Comment motiveriez-vous un candidat à se lancer dans une carrière dans le fret ferroviaire ?
C’est un domaine dans lequel vous pouvez avoir un impact réel. D’une part, parce que le secteur présente un fort potentiel d’amélioration, et d’autre part, parce que l’amélioration du transport du fret ferroviaire a un impact considérable sur nos vies.
Quels sont les défis principaux du transport fret ferroviaire en général et des détenteurs de wagons spécifiquement ?
A) Est-ce-que vous pensez que les industries sont prêtes à y faire face ?
Je pourrais vous donner une liste de défis, mais restons concentrés. Le fret ferroviaire fait partie intégrante du système ferroviaire et souffre d’un « héritage en patchwork ». Chaque pays en Europe possède ses propres réglementations nationales, normes et procédures en matière d’infrastructure ferroviaire, d’exploitation des trains et de signalisation. Cette fragmentation entraîne de nombreuses inefficacités. Le fret ferroviaire progresse vers la modernisation, mais le système dans son ensemble doit accélérer son uniformisation afin d’assurer une meilleure intégration entre les réseaux ferroviaires nationaux.
Je pense que les parties prenantes prennent de plus en plus conscience de la nécessité d’une approche globale. Des initiatives européennes, portées par des programmes de recherche et d’innovation tels que Europe’s Rail, contribuent à accélérer la transformation collective dont nous avons besoin.
Les détenteurs de wagons souhaitent voir le système ferroviaire global devenir plus compétitif et plus résilient. Le difficile contexte économique et géopolitique des dernières années pèse déjà lourdement sur leur activité. De plus, si l’offre globale de fret ferroviaire ne répond pas aux besoins des clients, cela ne fait qu’aggraver la situation. Les détenteurs de wagons peuvent améliorer leurs produits, mais ils supportent des coûts qui ne leur apportent pas directement de bénéfices. Il est difficile de faire comprendre cette problématique aux décideurs politiques et au grand public.
B) L’industrie du transport routier évolue rapidement vers la neutralité climatique, ce qui signifie qu’un avantage concurrentiel important du fret ferroviaire disparaît. Quelles possibilités voyez-vous pour améliorer la position du rail par rapport à la route ?
La transition du transport routier vers la neutralité climatique représente un défi pour le fret ferroviaire, mais c’est aussi une opportunité d’accélérer sa propre transformation. L’amélioration de la position du fret ferroviaire par rapport au transport routier repose sur la mise en avant de ses atouts, notamment son efficacité énergétique supérieure et ses émissions de CO² plus faibles. Une numérisation accrue du réseau ferroviaire ainsi qu’une meilleure intégration du rail dans les chaînes logistiques multimodales sont des leviers essentiels de cette transformation. Le rail doit se positionner non seulement comme l’option la plus écologique, mais aussi comme un mode de transport plus fiable, plus rentable et tourné vers l’avenir.
Je voudrais focaliser sur les deux jalons, l’attelage automatique numérique et la digitalisation dans l’industrie du fret ferroviaire. Pensez-vous que l’un de ces éléments, voire les deux combinés, pourraient être le tournant nécessaire pour rendre le fret ferroviaire plus attractif ?
Absolument, et le DAC englobe déjà ces deux aspects.
L’attelage automatique répond à un enjeu majeur du fret ferroviaire : l’obsolescence et l’inefficacité du système de l’attelage manuel. En automatisant ce processus, nous pouvons considérablement réduire la charge opérationnelle, améliorer la sécurité et diminuer les coûts, renforçant ainsi la compétitivité globale du transport ferroviaire de marchandises.
Le “D” du DAC introduit une dimension supplémentaire en intégrant la digitalisation et la transmission d’énergie. Grâce à l’échange de données en temps réel et à la distribution d’énergie tout au long du train de fret, nous pouvons mieux intégrer le matériel roulant avec l’infrastructure, les opérations et les autres modes de transport. Le DAC permet ainsi d’atteindre de nouveaux niveaux d’efficacité et de flexibilité. Il transformera les besoins en main‑d’œuvre et ouvrira le marché de l’emploi. La digitalisation complète d’un train de fret nous offrira la capacité de répondre aux exigences des clients et de devenir une véritable solution pour une logistique optimisée. L’introduction du DACC : Opérations Digitales, Automatisées, Connectées et Orientées Client (DACC) fera du fret ferroviaire un mode de transport plus rapide, plus fiable et plus adaptable aux évolutions des demandes clients, renforçant ainsi son attractivité en tant que solution moderne et écologique.
L’UE vise à déployer le DAC d’ici 2030. Pensez-vous que cet horizon temporel soit réaliste ? Si ce n’est pas le cas, quels sont les principaux obstacles à l’atteinte de cet objectif ?
L’objectif de passer à des opérations ferroviaires de fret entièrement digitalisées (FDFTO) avec le DAC d’ici 2030 est ambitieux, mais il reste réalisable. Adoptons une approche progressive : finaliser le développement et les tests d’une technologie européenne unifiée, valider la faisabilité et les bénéfices économiques du FDFTO avec le DAC en exploitant des trains de fret commerciaux, évaluer la faisabilité de la migration en tenant compte du parc existant, des wagons, des locomotives et du trafic, et garantir un financement public adéquat. Chaque étape est essentielle pour un déploiement réussi à l’échelle européenne et il prend du temps, c’est pourquoi nous devons rester ambitieux. Bien que le calendrier soit serré, l’urgence de respecter les objectifs du Pacte Vert pour l’Europe (European Green Deal) doit insuffler la dynamique nécessaire pour atteindre cet objectif.
Lors de notre entretien préliminaire, nous avons évoqué le défi de rassembler tous les acteurs de l’industrie du fret ferroviaire autour d’une solution commune. Pourriez-vous expliquer cela plus en détail, peut-être avec un exemple ?
Le défi de mettre tous les acteurs du fret ferroviaire en accord peut être illustré par l’exemple du déploiement du DAC. Alors que certains pays ou entreprises souhaitent mettre en place le DAC rapidement, d’autres adoptent une approche plus prudente en raison des coûts associés ou parce qu’ils donnent la priorité à d’autres investissements, comme la modernisation des infrastructures. La complexité d’aligner toutes ces parties prenantes autour d’une vision et d’une stratégie communes constitue un obstacle majeur à la mise en œuvre harmonisée de cette innovation à l’échelle européenne. Pour surmonter ce défi, il est essentiel de mettre en place un cadre de gouvernance solide ainsi qu’un soutien financier à la fois au niveau de l’UE et des États membres, afin de garantir que tous les acteurs restent engagés envers un objectif commun.
Une question sur Ermewa : Pourriez-vous nous parler d’une innovation actuelle d’Ermewa qui a le potentiel d’être adaptée avec succès par le reste de l’industrie ?
Il serait prétentieux de prétendre que nous sommes les seuls à avoir de bonnes idées. Je crois fermement au potentiel de maintenance 4.0 et au transport ferroviaire de marchandises palettisées. Le premier sujet englobe tout ce que les technologies numériques et l’IA peuvent nous offrir, tandis que le second concerne le concept logistique (et le wagon) qui permettra de favoriser le transfert modal au-delà des produits en vrac solides et liquides.
Et enfin, une question personnelle : Comment vous détendez-vous pendant votre temps libre pour être de nouveau plein d’énergie et de pouvoir au travail ?
La réponse est très banale. Je passe du temps avec ma famille, je fais un peu de sport, je vais au cinéma, au théâtre ou au restaurant… J’aime mon travail, j’aime ce secteur, j’aime les gens avec lesquels je travaille, et je ne compartimente pas strictement ma vie professionnelle et personnelle. Cela me manquera quand viendra le moment de passer à autre chose.

LTM: Le cap est le bon, mais le chemin reste parsemé d’embûches.
Le 28 février 2025, l’Office fédéral des transports (OFT) a accueilli à une table ronde des représentantes et représentants du secteur du fret. Le débat portait sur la mise en œuvre de la loi sur le transport de marchandises (LTM) entièrement révisée, avant même son adoption définitive par le Parlement. La LTM constitue le fondement de l’autofinancement dans le trafic par wagons complets isolés (TWCI). Toutefois, les défis restent immenses.
Les enjeux:
- Le cap est mis sur une mise en œuvre «sportive» en 2026
- Les mesures de financement se précisent
- Les subventions stimulent les acteurs
- Un soutien financier supplémentaire en faveur de la demande
- Le DAC permet de s’affranchir de nombreuses contraintes
- L’avenir s’annonce très sinueux
Le cap est mis sur une mise en œuvre «sportive» en 2026
L’OFT a présenté aux personnes qui participaient aux débats une feuille de route «sportive» pour la mise en œuvre de la LTM. L’office part du principe que le Parlement adoptera la LTM entièrement révisée lors de son vote final du 21 mars 2025. Les dispositions d’exécution seront mises en consultation au plus tard en mai 2025. La loi, tout comme les dispositions d’exécution, devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2026. Après la mise en consultation des dispositions d’exécution, l’OFT souhaite convoquer une nouvelle table ronde afin de clarifier les questions des représentants du secteur encore en attente de réponse.
Les mesures de financement se précisent
En mentionnant des subventions dans la LTM, le régulateur vise à ce que le TWCI atteigne l’autofinancement. Il prévoit à cet effet des subventions pour différents groupes d’intérêt:
- Accords de prestations avec les prestataires du TWCI
- Contributions au transbordement et au chargement destinées aux exploitants ou utilisateurs d’installations et financées par la suppression du remboursement de la RPLP en pré- et postacheminement du transport combiné non accompagné (TCNA)
- Contributions à l’investissement pour les installations de fret privées
- Contributions forfaitaires à l’investissement destinées à encourager le couplage automatique digital (DAC)
Les accords de prestations avec les prestataires du TWCI doivent couvrir les éventuels frais d’exploitation non couverts durant la transition de l’automatisation et de la digitalisation. Une fois les mesures d’encouragement achevées, le TWCI devra fonctionner de manière autonome sur le plan financier. Pour cela, le TWCI devra devenir plus productif en tant que système global, par exemple en modernisant les offres et en en créant de nouvelles ou en améliorant la qualité de la structure de service. De plus, la digitalisation permet d’automatiser, de simplifier et de débureaucratiser les processus; et ce avant même que le DAC ne soit opérationnel. Grâce à ces adaptations, le transport ferroviaire de marchandises deviendra plus attrayant non seulement pour les clients existants, mais aussi pour les nouveaux clients potentiels.
Les subventions stimulent les acteurs
Le financement transitoire envisagé durera deux fois quatre ans. Il donnera aux parties prenantes le temps nécessaire pour relever les défis. Pour cela, une certaine «symétrie des sacrifices» est nécessaire entre les groupes d’intérêt, ce qui passe aussi par des augmentations modérées des prix appliqués par les chargeurs. Ces augmentations de prix devront toutefois aussi se justifier par des améliorations de la qualité au sein du système. Les augmentations de prix importantes et à court terme ainsi que les restrictions de l’offre vont à l’encontre de l’autofinancement (cf. article du blog intitulé «CFF: Des exigences élevées, mais zéro compromis»). En effet, elles amènent les chargeurs à se détourner du TWCI, rendant ainsi l’autofinancement de celui-ci encore plus difficile à atteindre. Les conventions de prestations sont à juste titre liées à la rédaction de rapports réguliers, au monitorage des indicateurs clés et à un mécanisme de sanction se déclenchant si les objectifs ne sont pas atteints. Ces conditions garantissent de manière convaincante que le subventionnement – autrement dit l’argent des contribuables – aide le TWCI à se rapprocher de l’autofinancement.
Un soutien financier supplémentaire en faveur de la demande
Avec les contributions au transbordement et au chargement versées aux exploitants ou utilisateurs d’installations et les contributions à l’investissement mobilisées pour les installations de fret privées, le législateur soutient également le TWCI côté demande et les fournisseurs de points de desserte. C’est important, car sur le chemin de l’autofinancement, il faudra aussi stabiliser le côté de la demande. Un recul des volumes transportés dans le système ferroviaire affaiblirait le TWCI. Les contributions au transbordement et au chargement versées aux exploitants ou utilisateurs d’installations sont financées par la suppression du remboursement de la RPLP pour les parcours initiaux et terminaux du TCNA. En conséquence, la Confédération ne débloque pas d’argent supplémentaire, mais change seulement de bénéficiaire pour ses subventions.
Le DAC permet de s’affranchir de nombreuses contraintes
Le Parlement a aussi l’intention d’instaurer dans la LTM révisée des contributions forfaitaires à l’investissement pour le DAC. Ces contributions devraient donner au TWCI l’impulsion technologique dont il a besoin pour atteindre l’autofinancement. En effet, le DAC rend possible la modernisation et l’automatisation de la production dans le fret ferroviaire, tant attendues, le secteur ne pouvant pas porter à lui seul la mise en œuvre de cette innovation. D’une part, les marges du transport ferroviaire de marchandises sont déjà étroites aujourd’hui. D’autre part, il y a un problème de coordination, car les atouts du DAC ne profitent en majeure partie pas aux propriétaires de wagons, qui sont contraints de procéder au rééquipement, mais aux entreprises de transport ferroviaire. Ce sont pourtant les propriétaires de wagons qui doivent supporter la totalité des coûts de rééquipement. Les chargeurs doivent pour leur part adapter la construction de leurs voies de raccordement et leurs véhicules moteurs et financer la digitalisation de leurs processus. Les chargeurs et les propriétaires de wagons apportent donc une contribution tout aussi pertinente à l’assainissement du système de TWCI que les entreprises de fret ferroviaire.
L’avenir s’annonce très sinueux
La LTM entièrement révisée offre au secteur un fondement bienvenu pour remettre sur la bonne voie le TWCI en l’espace de seulement quelques années. Le Parlement voit le TWCI d’un œil favorable, y compris parce qu’il sait que l’on ne peut pas se permettre un échec, pour des raisons tenant tant à la technologie des transports qu’à l’écologie. Néanmoins, l’objectif n’est pas encore atteint, et le secteur doit prendre position. Dans ce contexte, les fortes hausses de prix et les limitations substantielles de l’offre ne seront pas bénéfiques pour les chargeurs. En effet, elles repoussent encore davantage l’objectif à atteindre, déjà ambitieux.

«Les technologies numériques soutiennent et soulagent nos collaborateurs»
Interview avec Thomas Küchler, directeur des SOB
Depuis des années, les chemins de fer du Sud-Est (SOB) font figure de précurseur en matière de digitalisation dans l’exploitation ferroviaire. Thomas Küchler, président de la direction, explique dans un entretien avec la VAP pourquoi les SOB sont convaincus du processus de changement fondamental de la digitalisation, comment les processus numérisés deviennent plus transparents, comment l’exploitation ferroviaire peut être (partiellement) automatisée, comment les profils professionnels actuels évoluent, quels enseignements les SOB tirent des données d’état, et pourquoi il est important d’échanger des données dans des écosystèmes de données.
Monsieur Küchler, tout le monde parle de digitalisation à l’heure actuelle. Quel est votre avis sur le sujet?
Thomas Küchler: C’est vrai. Je vous montre volontiers les connaissances pratiques que les SOB ont acquises au cours des dernières années. Toutefois, je ne souhaite pas parler de technologies telles que la gestion des trains basée sur la communication. Nous devons plutôt considérer le thème de la digitalisation de manière fondamentale.
Aujourd’hui, beaucoup de choses sont représentées sous forme numérique dans le secteur ferroviaire. Mais il s’agit la plupart du temps de solutions isolées. Le flux d’informations n’est pas continu: différents lieux de stockage, divers formats, niveaux d’actualité divergents. Lorsqu’il s’agit de gérer des processus qui répondent aux exigences en vigueur en matière de «sécurité» et de «sûreté», on s’aperçoit rapidement que cela n’est que difficilement réalisable avec des dépenses raisonnables. En effet, le succès d’une entreprise ferroviaire repose sur un haut niveau de sécurité et la recherche permanente d’une plus grande efficacité. Les mesures de digitalisation doivent contribuer de façon tangible à garantir un fonctionnement sûr, et à augmenter l’efficacité.
Par conséquent, nous avons besoin d’une approche totalement nouvelle pour la digitalisation. Une gestion basée sur un logiciel est indispensable. Un tel système doit être modulaire et modulable, et les différentes fonctions doivent être reliées entre elles.
En tant que précurseurs dans ce domaine, qu’est-ce que les SOB entendent par digitalisation?
Thomas Küchler: Heureusement, la direction des SOB a identifié le potentiel de la digitalisation voilà des années.
Pour nous, il ne s’agit pas de reproduire numériquement des processus manuels. La structure actuelle des entreprises ferroviaires repose sur des processus du siècle dernier. Dans le secteur ferroviaire, les sous-systèmes existants ont généralement été réalisés à l’aide de logiciels. Le manque de continuité dans l’information est l’un des principaux obstacles.
Comment les SOB ont-t-ils surmonté la digitalisation?
Thomas Küchler: La direction a compris très tôt que notre entreprise devait évoluer vers la digitalisation, et qu’elle avait besoin d’un soutien compétent pour y parvenir. Nous avons fait appel à des experts techniques externes qui ont apporté une perspective extérieure dans notre monde ferroviaire. Nous avons ainsi compris que la réussite de la digitalisation nécessite un processus de changement fondamental. De plus, ce changement profond doit se faire sans interruption de l’activité. Une entreprise ferroviaire ne peut pas, comme une entreprise industrielle, se débarrasser de son ancien produit et en lancer un nouveau sur le marché. En outre, il est essentiel que l’ensemble du personnel suive le mouvement. Chaque collaboratrice et chaque collaborateur doit se confronter à la digitalisation dans son propre environnement.
Comment avez-vous concrétisé vos connaissances conceptuelles?
Thomas Küchler: Nous avons identifié quatre éléments pour une digitalisation complète: données, organisation, système, processus. Ces quatre éléments doivent être adressés de manière synchrone, et sont au cœur de la mise en œuvre. Nous avons conçu, au sens figuré, un bâtiment SOB commun à toute l’entreprise. Nous avons défini les données partagées qui doivent être disponibles pour tous les utilisateurs autorisés. Ensuite, nous avons installé les unités organisationnelles dans les étages de notre bâtiment SOB. Elles sont responsables de l’aménagement de leur étage et libres de l’organiser comme elles l’entendent. Mais elles doivent respecter les structures de données supérieures.
Comment avez-vous impliqué vos collaborateurs?
Thomas Küchler: C’est l’un des principaux facteurs de réussite. La transition ne vaut pas seulement pour les cadres. Tous les collaborateurs sont concernés. Nous avons donc fait des personnes concernées des parties prenantes. En tant que telles, elles doivent jouer un rôle actif et répondre aux questions suivantes: quelle amélioration simplifie mon travail de telle sorte que l’efficacité augmente avec un niveau de sécurité élevé? Nous avons constaté que ce sont justement les jeunes collaborateurs qui apportent de nouvelles idées qui peuvent être habilement associées à l’expérience des collaborateurs plus anciens.
La digitalisation apporte donc des changements dans toute l’entreprise?
Thomas Küchler: Bien sûr. Les entreprises ferroviaires sont fortement influencées par l’expérience de leurs collaborateurs. Auparavant, nous avions une très forte proportion de collaborateurs de longue date qui, grâce à leur expérience, constituaient l’épine dorsale de notre entreprise, et contribuaient de manière déci-sive à la qualité de notre production. Entre-temps, la durée moyenne des contrats de travail s’est raccourcie; nous avons aujourd’hui une fluctuation plus élevée. Nous devons donc travailler activement à la conservation des connaissances. De plus, les profils professionnels changent davantage. En tant qu’entreprise, nous devons également suivre cette tendance.
Quels sont les liens entre le changement et la digitalisation?
Thomas Küchler: Il en existe deux. Premièrement, la digitalisation accélère la transformation des profils professionnels. L’effet est tout à fait intéressant, car dans de nombreux cas, les profils professionnels deviennent plus attrayants. Il est important de faire participer les collaborateurs de longue date à cette aventure. Deuxièmement, la digitalisation permet de contrôler le système. Ce contrôle est décisif pour garantir le processus. Il nous aide à mettre en œuvre un système de gestion de la sécurité adapté à la pra-tique et répondant à toutes les exigences. Enfin, cela nous permet d’éviter de dépendre de certains collaborateurs.
Le changement n’est toutefois pas perçu uniquement de manière positive. Qu’en pensez-vous?
Thomas Küchler: Celui qui, après des années de travail fructueux, maîtrise son métier, peut aussi réagir de manière critique aux changements. Mais nous devrions tenir compte d’une particularité du secteur ferroviaire: de nombreux travaux traditionnels dans le quotidien des chemins de fer sont physiquement éprouvants. Il faut les effectuer de manière fiable et sûre à tout moment de la journée, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Nous avons aujourd’hui de plus en plus de mal à recruter de nouveaux collaborateurs pour ces tâches. Je considère donc comme positif le fait que la digitalisation et l’automatisation modifient les «métiers de cheminots» traditionnels et créent de nouveaux profils professionnels.
La sécurité en est un bon exemple. Autrefois, de nombreuses activités dans l’exploitation ferroviaire étaient directement déterminantes pour la sécurité. Le collaborateur vérifiait que la voie était libre et donnait l’ordre de circuler. Aujourd’hui, il est assisté par des systèmes de guidage qui garantissent une conduite sûre. Avec l’ancienne méthode, la densité des horaires actuels serait impossible à at-teindre de manière sûre et efficace.
Comment les technologies peuvent-elles aider vos collaborateurs?
Thomas Küchler: Les tests ont montré que nous ne visons pas un fonctionnement entièrement automatisé sans personnel. Les technologies numériques doivent plutôt soutenir et soulager nos collaborateurs en optimisant en permanence l’utilisation des sillons, surtout en cas d’écarts.
Et dans quelle mesure la digitalisation améliore-t-elle l’exploitation?
Thomas Küchler: Pour notre trafic voyageurs, nous utilisons en grande partie des rames automotrices modernes. Ce sont de véritables centrifugeuses de données, elles collectent en permanence des données d’état pendant leur fonctionnement. Nous travaillons ici en collaboration avec le fabricant Stadler. Stadler collecte les données pour nous. Nous avons la maîtrise des données, nous reprenons une grande partie des données brutes, et nous les analysons en partie nous-mêmes. Grâce à l’évaluation dite de l’état, nous pouvons identifier les tendances en temps réel, prendre des mesures efficaces et les mettre en œuvre en temps voulu. La digitalisation nous aide à réagir rapidement.
Qu’est-ce qui pousse les SOB à faire leur transition numérique?
Thomas Küchler: Une entreprise ferroviaire doit s’orienter vers les clients. Leurs besoins évoluent constamment. Nous devons pouvoir identifier rapidement les tendances, et réagir correctement grâce aux indicateurs correspondants. Les chiffres clés saisis nous permettent d’évaluer l’impact de nos mesures. Pour que notre modèle commercial reste performant, nous devons améliorer l’efficacité tout en garantissant la sécurité. De cette manière, nous assurons la viabilité commerciale de notre entreprise. La digitalisation est un outil idéal pour mener à bien notre activité.
Monsieur Küchler, merci beaucoup pour cet entretien intéressant.

Session d’hiver 2024: des décisions qui feront date
Du 2 au 20 décembre 2024, le Conseil des États et le Conseil national se sont réunis pour le dernier tour de délibérations parlementaires de l’année 2024. D’importants sujets de politique des transports étaient à l’ordre du jour des deux conseils.
Les enjeux
- 16,4 milliards de francs pour l’exploitation ferroviaire et la promotion des voies de raccordement
- Débat enflammé à propos des besoins supplémentaires pour l’étape d’aménagement 2035
- Refus d’un renforcement de la responsabilité des détenteurs de wagons de marchandises
16,4 milliards de francs pour l’exploitation ferroviaire et la promotion des voies de raccordement
Après le Conseil national, c’est au tour du Conseil des États de valider le cadre financier pour l’exploitation et le maintien de la qualité des installations ferroviaires pour les années 2025 à 2028, à hauteur de 16,4 milliards de francs. Le Conseil des États a ainsi approuvé deux autres arrêtés fédéraux portant sur 185 millions de francs pour la prolongation des contributions aux investissements dans les installations privées de fret.
Débat enflammé à propos des besoins supplémentaires pour l’étape d’aménagement 2035
L’étape d’aménagement n’a rien à voir avec le financement de l’exploitation ferroviaire évoqué plus haut. Le Conseil des États a néanmoins mené un débat houleux sur les coûts supplémentaires, qui ont été largement thématisés dans les médias. La proposition de renvoyer le projet à la commission d’examen préalable pour cette raison a finalement été retirée. Le fait que les CFF soient responsables de la planification des étapes d’aménagement sur mandat de l’Office fédéral des transports (OFT) n’a pas été mentionné dans la discussion.
Refus d’un renforcement de la responsabilité des détenteurs de wagons de marchandises
Avec la motion 24.3823 «Responsabilité en matière de risque des détenteurs de wagons. Révision», la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national voulait obliger le Conseil fédéral à introduire une responsabilité pour risque et une obligation d’assurance. Le Conseil national a rejeté la motion par 91 voix contre 89 et 4 abstentions, ce qui équivaut à une décision de bon sens. Une majorité de conseillères et conseillers nationaux a mis de côté les émotions liées à l’accident du 10 août 2023 dans le tunnel de base du Saint-Gothard, et s’est prononcée en faveur d’une politique climatique et de transfert réussie.
Nos arguments en tant que voix de l’économie des chargeurs ont apparemment réussi à convaincre: les détenteurs de wagons de marchandises sont déjà responsables aujourd’hui dans le cadre de la responsabilité pour faute avec renversement de la charge de la preuve à leur dépens. Ils disposent actuellement de couvertures d’assurance élevées, et investissent des sommes importantes dans l’entretien et l’acquisition de nouveaux wagons conformes aux dernières avancées technologiques. La motion aurait fortement compliqué le fret ferroviaire tout en le rendant plus cher. Une adoption de la motion aurait remis en question la politique climatique et de transfert réussie de la Suisse.

Ne pas mettre inutilement en péril le système de fret ferroviaire
En août 2024, la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national a déposé, par 13 voix contre 8 et 4 abstentions, la motion 24.3823 «Révision de la responsabilité en matière de risque des détenteurs de wagons». La motion veut introduire une responsabilité pour risque et une assurance obligatoire pour les détenteurs de wagons, y compris la fixation du montant de la couverture. Ceci au motif d’augmenter la sécurité du transport ferroviaire de marchandises. Le Conseil national débattra de la motion le mardi 10 décembre 2024.
Les enjeux:
- La motion est en contradiction avec le système
- La motion n’augmente pas la sécurité
- La motion torpille la politique de transfert de la Suisse
- La motion entraîne une inégalité de traitement
La motion est en contradiction avec le système
Dans le système actuel, les détenteurs de wagons sont responsables de l’immatriculation et de la maintenance de ces derniers. En cas de sinistre, en présence de défauts sur le wagon, ils sont présumés coupables et responsables du dommage s’ils ne peuvent pas prouver qu’ils ont pris toutes les mesures de sécurité nécessaires. Les entreprises de transport ferroviaire (ETF) sont responsables de l’exploitation et de la sécurité des trains/wagons, tandis que les détenteurs de wagons n’exercent aucune influence sur les contrôles de sécurité lors de l’utilisation opérationnelle de leurs wagons. Une extension de la responsabilité aux détenteurs de wagons nuirait fortement à l’efficacité et à la rentabilité du transport ferroviaire de marchandises et est donc en contradiction avec le système.
La motion n’augmente pas la sécurité
Une responsabilité plus stricte augmente le coût du transport de marchandises et le rend plus compliqué du fait que le transfert de wagons de marchandises entre différents domaines de responsabilité devient plus complexe et plus coûteux. De ce fait, la Suisse dispose d’un moins grand nombre de wagons, car la capacité des wagons en provenance de l’étranger ferait défaut. Cela diminue l’attrait du transport ferroviaire de marchandises et torpille la politique de transfert de la Suisse. En faisant cavalier seul, la Suisse sape le cadre réglementaire européen élaboré et équilibré au fil des décennies, et conduit à une solution isolée, propre à la Suisse. De plus, notre pays met ainsi en péril son rôle important dans le transport de marchandises européen, ce qui menace finalement la sécurité de l’approvisionnement.
La motion torpille la politique de transfert de la Suisse
une responsabilité plus stricte augmente le coût du transport de marchandises et le rend plus compliqué du fait que le transfert de wagons de marchandises entre différents domaines de responsabilité devient plus complexe et plus coûteux. De ce fait, la Suisse dispose d’un moins grand nombre de wagons, car la capacité des wagons en provenance de l’étranger ferait défaut. Cela diminue l’attrait du transport ferroviaire de marchandises et torpille la politique de transfert de la Suisse. En faisant cavalier seul, la Suisse sape le cadre réglementaire européen élaboré et équilibré au fil des décennies, et conduit à une solution isolée, propre à la Suisse. De plus, notre pays met ainsi en péril son rôle important dans le transport de marchandises européen, ce qui menace finalement la sécurité de l’approvisionnement.
La motion entraîne une inégalité de traitement
Des opérations identiques – tracter des véhicules par un véhicule de traction – ne sont pas traitées de la même manière si la motion est adoptée. Cela se produit dans la relation entre un tracteur routier et un train de marchandises, mais aussi dans la relation entre un train de voyageurs et un train de marchandises.

La motion 24.3823 «Révision de la responsabilité en matière de risque des détenteurs de wagons» manque donc sa véritable cible. Elle est onéreuse pour toutes les parties concernées et réduit la compétitivité du rail par rapport à la route. Le système actuel garantit déjà la sécurité du transport ferroviaire de marchandises et offre les conditions-cadres les plus efficaces pour la politique de transfert de la Suisse.

La CTT‑N renforce le fret ferroviaire grâce à une concurrence et une transparence accrues
Dans le cadre de l’objet 24.0017, la commission d’examen préalable du Conseil national (CTT‑N) demande à son conseil d’entrer en matière et d’approuver les crédits destinés au déploiement du couplage automatique digital (DAC) ainsi que l’indemnisation limitée dans le temps du transport par wagons complets isolés (TWCI) ainsi que la commande du transport de marchandises. Elle effectue également quelques précisions décisives dans le texte de loi: la concurrence doit être davantage encouragée et des financements croisés entre les prestations subventionnées et celles autofinancées doivent être empêchés en publiant des chiffres-clés et des flux financiers dans les rapports d’activité des entreprises de fret ferroviaire. Par ailleurs, la CTT‑N veut ancrer expressément la navigation intérieure dans le projet de loi afin de créer davantage de sécurité juridique.
En revanche, l’objectif complété dans la loi d’augmenter la part du fret ferroviaire est moins pertinent. Ce message devrait plutôt être adressé à la compagnie étatique CFF dominant le marché qui continue de chasser des transports du rail de par sa politique actuelle en matière d’offre et de prix. Cela enterre la dernière confiance des clients dans la compétitivité et la volonté des chemins de fer publics. En fait, les mesures prévues dans le projet de loi sont plus efficaces que des objectifs ambitieux: le fret ferroviaire peut gagner des parts de marché grâce à la digitalisation prévue et à la mutation d’un système du 19e siècle vers le 21e siècle. L’encouragement désormais encore renforcé de la concurrence entre les entreprises de fret ferroviaire, combiné à l’indemnisation limitée dans le temps du TWCI pourrait bientôt entraîner une offre élargie et des parts de marché croissantes pour le rail. Les propositions de la CTT‑N, qui apportent des précisions, devraient à cet égard être bien plus efficaces que des objectifs de transfert non contraignants, qui sont en outre contraires à la Constitution.
Malheureusement, les demandes pour plus de transparence et de concurrence lors de la construction et l’exploitation d’installations de transbordement n’ont pas trouvé de majorité.

129 nouvelles locs pour CFF Cargo: comment ça marche?
CFF Cargo veut renouveler sa flotte d’ici 2035 avec jusqu’à 129 locs de ligne modernes. Dans le même temps, elle déplore des coûts fixes élevés dans le trafic par wagons complets isolés (TWCI), a augmenté ses tarifs de façon disproportionnée ces derniers mois tout en réduisant son offre. Cette situation présente un risque majeur de retransfert vers la route. À la VAP, nous remettons en question cette grosse commande et demandons plus de transparence.
Les enjeux:
- CFF Cargo investit dans l’avenir du fret ferroviaire.
- Les hausses de prix et la réduction de l’offre font fuir les clients du fret ferroviaire.
- VAP remet en question le raisonnement économique et demande de la transparence.
CFF Cargo investit dans l’avenir du fret ferroviaire
CFF Cargo veut moderniser sa flotte et garantir ainsi l’avenir du transport de marchandises par rail. Dans un communiqué de presse du 26 septembre 2024 , l’entreprise a annoncé l’achat de jusqu’à 129 nouvelles locs de ligne. Elles devraient être livrées entre 2027 et 2035 et remplacer les véhicules tracteurs vieillissants. CFF Cargo présente sa décision comme nécessaire afin de préparer le fret ferroviaire à l’avenir, ce qui est une bonne chose. Les nouvelles locs sont plus efficaces, plus performantes et équipées de technologies innovantes comme un système d’entraînement sur piles pour le dernier kilomètre. Ainsi, CFF Cargo veut réduire les coûts d’exploitation de 60 % et contribuer à l’automatisation du fret ferroviaire.
Les hausses de prix et la réduction de l’offre font fuir les clients du fret ferroviaire
Pour nous, à la VAP, une question centrale se pose: comment l’acquisition massive de 129 locomotives est-t-elle compatible avec le développement et les pratiques commerciales actuelles de CFF Cargo? Ces derniers mois, CFF Cargo a exposé ses clients du fret ferroviaire à des hausses de prix significatives et à une réduction de l’offre (cf. l’article du blog VAP «Révision totale de la LTM: le moral du secteur menace de s’effondrer». Ce comportement de distorsion du marché pourrait entraîner une réduction des volumes dans le fret ferroviaire et un transfert accru vers la route. Si ce cas de figure se présente effectivement, un investissement aussi important ne se justifie pas.
VAP remet en question le raisonnement économique et demande de la transparence
CFF Cargo reste malheureusement discret sur les effets opérationnels et financiers de ce grand projet. Cela ne favorise pas la confiance dans la filiale de fret de l’État. On parle tout de même d’investissements de plusieurs centaines de millions, qui doivent être supportés par les clients du fret ferroviaire, dans l’hypothèse de l’autofinancement. C’est pourquoi nous estimons qu’il est indispensable que CFF Cargo fasse part de ses réflexions. Par ailleurs, nous lui suggérons de reconsidérer le nombre de locomotives et d’envisager, en complément de l’achat, une location ou un achat partiel avec une option sur un plus grand nombre de locs.

La digitalisation du fret ferroviaire s’accélère
La sphère politique adapte les conditions-cadres pour la migration vers le couplage automatique digital (DAC) et la technologie pour la future norme est déterminé pas à pas. La Suisse coordonne son processus d’introduction avec celui de l’Europe. En tant qu’acteurs de la branche, nous voulons, à la VAP, faire progresser l’autorisation pour le trafic commercial et assumons par conséquent un rôle clé dans la coordination et la documentation des projets correspondants.
Les enjeux:
- Le Conseil des États donne le feu vert au DAC et au trafic par wagons complets isolés.
- La LTM harmonisée avec la feuille de route européenne.
- La technologie doit faire ses preuves en tant que norme.
- La branche suisse joue le rôle de pionnier.
- Deux étapes, un objectif: la mise en réseau avec le futur.
- La VAP transforme son expérience en solutions adaptées à la pratique.
Le Conseil des États donne le feu vert au DAC et au trafic par wagons complets isolés.
Les développements autour de la digitalisation du fret ferroviaire se déroulent littéralement sur plusieurs voies. Des jalons importants ont été posés le 24 septembre 2024 dans le processus politique. Lors de cette journée de délibération durant le session d’automne du Parlement suisse, le Conseil des États a délibéré sur la révision totale de la loi sur le transport de marchandises et a approuvé le crédit d’engagement relatif au déploiement du DAC à hauteur de 180 millions de francs ainsi que celui relatif à la modernisation du trafic par wagons complets isolés d’un montant de 260 millions de francs. Le conseil prioritaire a ainsi pris en compte les principaux éléments-clés du message du Conseil fédéral du 10 janvier 2024 et s’est à une large majorité explicitement déclaré en faveur de la digitalisation du fret ferroviaire grâce à l’innovation perfectionnée depuis de longues années. Voici ce qu’a déclaré le conseiller fédéral Albert Rösti lors de son exposé devant le plénum du Conseil: «Outre le couplage automatique digital, d’autres étapes concrètes de modernisation sont prévues, comme des plateformes de réservation.» Nous expliquons pourquoi cette remarque reflète une perspective holistique du DAC dans l’article de notre blog «Écosystèmes de données: le secteur participe à une table ronde avec le conseiller fédéral Rösti».
La LTM harmonisée avec la feuille de route européenne.
La planification de la LTM révisée et de l’ordonnance correspondante est en harmonie avec la feuille de route européenne. La mise en œuvre est prévue entre fin 2026 et début 2027. À partir de là, les fonds fédéraux budgétisés seront disponibles pour la migration vers le DAC. Les acteurs du European DAC Delivery Programme (EDDP) d’Europe’s Rail souhaitent déployer à grande échelle la migration vers le DAC à partir de 2028. Ce programme de mise en œuvre réunit les entreprises de transport ferroviaire, les exploitants d’infrastructure, les détenteurs de wagons ainsi que les fournisseurs d’équipements ferroviaires, les organismes responsables de la maintenance, les organisations du secteur, les centres de recherche ferroviaire et les institutions politiques. Ce programme commun intégré s’appuie sur les résultats de la recherche et du développement ainsi que sur des projets pilotes et vise à garantir les mesures nécessaires à un déploiement rapide, techniquement et économiquement réalisable du DAC à l’échelle européenne.
La technologie doit s’imposer en tant que norme.
Pour atteindre cet objectif ambitieux, il faut une technologie développée et testée en entreprise. Là aussi, l’EDDP a déjà effectué un travail préparatoire considérable et a annoncé début 2024 le «DAC Basis Package» comme future norme de système pour le fret ferroviaire en Europe. L’EDDP prévoit des trains pilotes dans toute l’Europe afin d’affiner et de tester dans son intégralité la technologie du «DAC Basis Package». Le paquet de lancement comprend les éléments suivants:
- DAC (mécanique / pneumatique) y compris système énergétique / de données
- Identification de la composition de train
- Essai de frein automatique
- Contrôle de la complétude du train
- Découplage automatique (dans le train depuis la locomotive ou le côté du wagon)
Une décision importante doit encore être prise concernant le système: pour la technologie de transmission de données dans le train, il reste encore à choisir entre Single per Ethernet et Powerline+. Comme des tests avec Powerline+ ont déjà été réalisés avec succès en Suisse, il s’agit maintenant de réaliser rapidement un train pilote homologable embarquant cette technologie.
La branche suisse joue le rôle de pionnier.
La Suisse veut contribuer significativement au projet de développement européen DAC coordonné par l’EDDP et le combiner étroitement avec les organisations européennes d’EDDP. Ainsi, le secteur ferroviaire suisse s’apprête à faire avancer l’intégration du système pour autoriser les utilisations commerciales. Les spécifications techniques et l’étendue des prestations fonctionnelles du «DAC Basis Package» et la technologie de transmission Powerline+ forment la base des futurs travaux de l’équipe de projet suisse. De là, l’OFT, la VAP et l’UTP élargiront en conséquence leur déclaration d’intention signée conjointement sur l’automatisation dans le fret ferroviaire.
Deux étapes, un objectif: la mise en réseau avec le futur.
La contribution de la Suisse au déploiement du DAC se déroule en deux étapes. Au préalable, il convient de faire avancer rapidement l’intégration du système sur le train pionnier suisse jusqu’à ce qu’il soit prêt pour l’homologation, puis de démontrer son aptitude à être utilisé au quotidien dans le cadre d’une application commerciale. La Confédération soutiendra le développement par un financement conformément à l’article 10 de la loi sur le transport de marchandises.
- Le projet de développement PD3 pour la réalisation de l’homologation d’un premier train pionnier avec les fonctions selon le «DAC Basic Package» a commencé. L’objectif est d’obtenir d’ici mi-2026 une autorisation d’exploitation de l’OFT pour des trajets commerciaux définis sur le réseau suisse à voie normale. Pour ce faire, une trentaine de membres motivés de Swissrail, de CFF Cargo et de l’OFT ainsi que des représentants de la VAP ont manifesté le 30 août 2024 leur intention de rendre ensemble le fret ferroviaire compétitif et de faire connaître la technologie suisse DAC à l’extérieur. Avec le PD3, les acteurs du secteur veulent contribuer de manière significative à la définition de la future norme européenne en matière de fret ferroviaire. Il est temps de sortir des débats de fond et d’élaborer des solutions opérationnelles. Les nouveaux systèmes doivent être robustes, fonctionnels et finançables, afin que les trains de marchandises puissent à l’avenir circuler de façon rentable.
- Le projet de développement PD4 vise à mettre en service plusieurs trains avec DAC sur le réseau ferroviaire suisse pour des trajets commerciaux entre 2026 et 2027, une fois le PD3 achevé. Les premières discussions avec les chargeurs ont déjà eu lieu. On recherche des trafics isolés qui se prêtent à une conversion précoce au DAC en tant que trains pionniers. L’objectif de cette deuxième étape est d’acquérir de l’expérience en matière d’exploitation et de poursuivre le renforcement en situation réelle. Les trains pionniers doivent donner aux parties prenantes et aux investisseurs impliqués une image concrète des possibilités futures offertes par le DAC et la digitalisation qui l’accompagne dans le fret ferroviaire.
La VAP transforme son expérience en solutions adaptées à la pratique.
La VAP va coordonner et documenter les projets mentionnés pour toutes les personnes intéressées et impliquées. Nous voulons ainsi garantir un vaste échange d’expériences et une compatibilité totale avec la pratique jusque dans les voies de raccordement et la logistique de l’économie. Nos membres – en premier lieu les chargeurs et les détenteurs de wagons – participent activement aux deux étapes de développement. Cela permet de mettre à l’échelle les connaissances acquises dans le cadre de projets pilotes et de faire profiter tous les acteurs de la branche des synergies.
UNE VISIBILITÉ SOUHAITÉE
10.–11.4. 2025 – Swiss Shippers’ Forum Interlaken
Des obstacles aux opportunités: surmonter les barrières de commerce
Nos chaînes d’approvisionnement sont-elles prêtes à affronter les turbulences de l´avenir ?
Offre: les membres du VAP bénéficient du rabais pour les membres du SSC
14 mai 2025 – VAP FORUM FRET FERROVIAIRE, Zurich
Le prochain Forum Fret Ferroviaire aura lieu le 14 mai 2025 à Zurich. Des informations suivront.
- Lien vers l’agenda de Swiss Supply: Prochains événements
Médias
Communiqué de presse du 24 novembre 2024
Schlag gegen Multimodalität und Verkehrsverlagerung
fokus-oev-schweiz du 9. septembre 2024
Starke Zeichen – Generalversammlung 2024 des Verbandes der verladenden Wirtschaft (VAP)
bahnonline.ch du 31. août 2024
VAP-Generalversammlung 2024
Ship2Shore du 28. août 2024
Simon Wey è il nuovo direttore operativo di VAP
verkehr.co.at du 27. août 2024
VAP bekommt neuen Geschäftsführer
DVZ du 27. août 2024
Verladerverband VAP: Simon Wey wird neuer Geschäftsführer
Communiqué de presse du 27 août 2024
Assemblée générale 2004 de la VAP: L’avenir du rail est entre les mains de tous les acteurs
Communiqué de presse du 27 août 2024
Le Dr Simon Wey reprend la direction de la VAP
Industrie Woche du 4.6.2024
Daten-Eco-Systeme als Schlüssel für effiziente Logistiklösungen
Logistik News 24 du 28.5.2024
Politische und finanzielle Unterstützung für den Wagenladungsverkehr gefordert
Industry Press du 23.5.2024
Zukunft des Wagenladungsverkehrs: Herausforderungen und Chancen diskutiert
Logistik Woche du 23.5.2024
Magnetbahntechnik: Potenzial für autonomes Fahren von Güterwagen
verker.co.at du 20.5.2024
Forum Güterverkehr: Wagenladungsverkehr kann wettbewerbsfähig werden
Verkehrsrundschau du 17.5.2024
Wagenladungsverkehr kann wettbewerbsfähig werden
Communiqué de presse du 17 mai 2024
Forum Fret Ferroviaire: Le trafic par wagons complets peut devenir compétitif
Entreprise vom 26.4.2024
Berne veut remettre le fret sur les rails
VerkehrsMonitor du 23 avril 2024
Güterbranche ärgert sich über «intransparente» SBB Cargo
NZZ du 4 avril 2024
Güterzüge fahren chronisch Verluste ein
Rail Business du 18 mars 2024
SBB Cargo France soll linksrheinische Verkehre sichern
verkehr.co.at du 17 mars 2024
VAP-Stellungnahme zum SBB-Jahresergebnis 2023
Communiqué de presse du 14 mars 2024
Bilan annuel 2023 des CFF
Communiqué de presse du 31 janvier 2024
Verabschiedung Gleisanschluss-Charta 2024 in Deutschland
Communiqué de presse du 10 janvier 2024
Placer le bon aiguillage pour le trafic intérieur de marchandises sur le rail
SRF «Einstein» du 14 decembre 2024
Unfall im Gotthard Basistunnel: Wie wird die Bahn sicherer?
SRF «10 vor 10» du 19 octobre 2023
Konsequenzen nach Unfall im Gotthard-Basistunnel
Thèmes
Vous trouverez ici diverses publications de la VAP ou de nos organisations partenaires:
SECTEUR DU FRET
- Comment concevoir l’avenir du transport de marchandises?
- Qu’est-ce qui fait bouger le secteur du fret?
- Un aperçu des acteurs du fret ferroviaire.
RÉSEAU
Vous trouverez ici des informations utiles sur les voies ferrées, leur organisation et l’accès au réseau.
FINANCEMENT
Informations sur les aides financières et les taxes dans le transport de marchandises.
SITES
Tout sur le chargement libre, les terminaux, les installations de voies de raccordement ou encore les hubs logistiques multimodaux.
INTEROPÉRABILITÉ
La VAP s’engage à harmoniser les conditions-cadres afin que les trains puissent circuler sans difficulté sur les réseaux ferroviaires européens.
DURABILITÉ
Pour un avenir clairvoyant, il convient de concevoir différents domaines de manière durable.
Innovation
Comment pouvons-nous faire avancer l’innovation dans le transport de marchandises?
EXPLOITATION
En faveur d’une concurrence loyale, nous voulons utiliser la force de tous les modes de transport et les combiner de manière optimale. Car c’est ainsi que le trajet sera plus court – et plus économique – pour chacun d’entre nous.
ÉVÉNEMENTS
Vous trouverez ici des informations complémentaires et de la documentation sur nos manifestations Forum Fret Ferroviaire, notre Assemblée générale et autres.